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De « l’arrogance française »

dimanche 28 avril 2024 par Francis Arzalier (ANC)

La nation française, une des plus anciennes du monde, est marquée par les contradictions de son histoire. Elle fut à la fois grande puissance industrielle et coloniale avant bien d’autres, mais aussi accoucha de révolutions de l’esprit et modèle progressiste mondial. Elle en a de ce fait hérité de traditions idéologiques contradictoires, qui s’opposent et peuvent suivant le contexte changeant, donner naissance à des épisodes de progrès comme en 1936,1945 ou 1968. Mais ils peuvent aussi à l’occasion nourrir une vague réactionnaire qui menace de tout submerger, mélange de xénophobie raciste, de démagogie sécuritaire, et de destruction des conquêtes sociales et politiques antérieures.

Nous en sommes là en 2024, isolés dans notre quête obstinée de justice sociale, paix et démocratie, face à une opinion française modelée par les communicants libéraux et leurs obsessions sécuritaires, racistes et bellicistes, jusqu’aux outrances idéologiques qui criminalisent en antisémitisme et révérence poutinienne toute analyse anti-impérialiste.

Triste époque annoncée, les sondages se multiplient jusqu’à la nausée, qui prédisent notre marche impuissante à l’apocalypse nucléaire et un pouvoir musclé de la grande mouvance fascisante.

Telle est la désolante réalité française actuelle, qui devrait inciter nos « Élites » à un peu plus de modestie en s’adressant aux autres nations. Au lieu de cela, les dirigeants Macroniens, ministres inconsistants et monarque hors-sol, sont toujours ancrés dans leur autocélébration médiatique auprès d’un peuple anesthésié.

Ils ne cessent de se poser en donneurs de leçons, se clamant défenseurs de la démocratie quand ils en sont à vouloir réouvrir les prisons pour enfants, et additionnent les discours guerriers sur l’économie et la démographie en reconquête, quand le pays crève de la destruction de ses industries et de son agriculture, à tel point qu’il doit importer médicaments d’Asie et poulets d’Ukraine.
Tant et si bien qu’ils font s’esclaffer Asiatiques, Africains et Américains, qui ne supportent plus cette « arrogance française « hors de propos avec un pays qui se croit encore une grande puissance, et n’est plus qu’un second-couteau de l’Empire des États-Unis.

Rien n’est joué toutefois, l’exemple donné par les courageux étudiants de Sciences-Po Paris, comme celle des Universités des USA, le prouve. Reste à savoir si ce mouvement s’élargira, si nous l’accompagnons de notre mieux.

De « l’ignorance française » : l’illustration par le Soudan

L’opinion française, profondément marquée par sa longue pratique coloniale, en a conservé une ignorance crasse des réalités géographiques et géopolitiques, bien connue dans le reste du monde : » Les Français ignorent la géographie ! »

On ne peut écouter quelques minutes une chaîne d’info, publique ou privée, sans qu’il soit question de l’Ukraine en guerre, racontée par un prétendu « expert », ou un chroniqueur qui se juge tel. Parallèlement, la moindre enquête sérieuse d’un institut de sondage ne peut que confirmer que la majorité des citoyens se révèle incapable de situer, la dite Ukraine, sur une carte.
Et l’ignorance est plus abyssale encore sur l’histoire de cette contrée qui enfanta l’État russe au Moyen âge, et notamment sur l’indéniable collusion des nationalismes antisoviétiques et antirusses avec les envahisseurs allemands et Nazis durant les deux Guerres mondiales.

La même ignorance plus ou moins xénophobe, héritée de siècles de mépris colonial, est flagrante en ce qui concerne l’Afrique, sa mosaïque de peuples et de cultures, qu’un Président français moins hypocrite que les autres a eu le culot d’exprimer il y a quelques années devant les étudiants ébahis de Dakar :

« L’Afrique n’est pas encore vraiment entrée dans l’histoire contemporaine ! »

Une affirmation imbécile [1], mais encore partagée par de nombreux Français, qui confondent toujours Musulmans et Arabes, comme en 1954, et qui fantasment volontiers au sujet des « vagues migratoires africaines vers l’Europe », oubliant par la même occasion que la majorité de ces déplacements sont intra-africains, et qu’ils sont d’abord l’expression du malheur des peuples d’Afrique, de leur absence de développement industriel et agricole du fait des siècles coloniaux et impérialistes, et de la pauvreté qui en résulte, des millions de réfugiés chassés de chez eux par des guerres dont le moteur est souvent extérieur.

Une illustration évidente de cette cécité hexagonale à propos du reste du monde ?

Le Soudan, un pays d’Afrique ignoré par les médias de France, d’autant plus que cette ancienne colonie britannique est hors du champ dit « francophone ». Ils jouent sur du velours, bien peu de Français sauraient situer cet État sur la carte. Il s’agit pourtant du plus grand du continent (plus de 1 million 800 000 km2), et de l’un des plus peuplés avec plus de 40 millions d’habitants.

Ce mélange de peuples et de cultures a subi un long martyre colonial parsemé de guerres à prétextes ethnicistes ou religieux, en général suscitées par les appétits extérieurs. Ainsi, en 2016, une sanglante guerre « civile » (des centaines de milliers de morts) a permis d’ériger en État séparatiste le Soudan du Sud et son pétrole, à la satisfaction des convoitises impérialistes.
Une succession de convulsions armées ont suivi depuis, meurtrissant cette nation inachevée, en faisant aujourd’hui un pays ravagé, disputé entre milices armées dans ses villes et ses campagnes. En deux ans, plus de 20 000 morts, et surtout plus de 7 millions de réfugiés (dont plus de 100 000 au Tchad voisin), pour la plupart paysans et ouvriers tributaires de l’aide Onusienne pour survivre.

Plus grave encore, le Soudan est aujourd’hui divisé, amputé, effondré économiquemen (amputé de ses provinces sudistes pétrolières et christianisées, il ne conserve comme seule richesse exportable que de l’or, qui quitte le pays par d’obscurs circuits qui ne profitent guère à la majorité des citoyens).

Le Soudan était autrefois parcouru de luttes populaires structurées par des syndicats combattifs, des organisations professionnelles et des partis influents (notamment le PC Soudanais), à tel point qu’elles entraînèrent le départ du dictateur islamiste Al Béchir.
Il est devenu, comme Haïti en plus grand une société parcellisée, déconstruite, où les milices et les gangs font la loi dans des quartiers terrorisés. Un pays dont les officines humanitaires ne cessent d’annoncer la famine prochaine, dans la plus grande indifférence médiatique mondiale.

On ne peut que s’interroger, puisque tous les processus de paix engagés n’aboutissent qu’à quelques aides humanitaires supplémentaires, sur les responsables de ce drame occulté.

Évidemment, nos « experts » médiatisés occidentaux, quand ils consentent à en parler, attribuent la « guerre civile » soudanaise » à la seule culpabilité des peuples du Soudan, en prétextant leurs divisions ethniques et religieuses, et les volontés d’accéder au pouvoir politique de chefs militaires. Ce sont certes des réalités, dont se nourrissent les protagonistes actuels, chefs des Forces Armées Soudanaises (FAS) et ceux des Forces de Soutien Rapide (FSR), une milice paramilitaire, qui n’ont aucun programme politique que le Pouvoir et les bénéfices qui en découlent.
Leur responsabilité est évidente, mais ne doit pas occulter une question majeure :

Le Soudan fait partie de ces pays « du sud » subissant un paradoxe meurtrier, ravagés par la prolifération d’armes alors qu’ils n’en produisent aucune !

Sans les livraisons massives d’armes aux belligérants par des sponsors extérieurs, le conflit meurtrier devrait s’arrêter de lui-même. !

Et ces sponsors ont un visage, les Émirats Arabes Unis pour les FAR, et l’Égypte d’Al Sissi pour les FAS. Dans un contexte mondial dont l’élément majeur est l’affrontement direct préparé par l’Impérialisme occidental en Europe, au Moyen-Orient et en Mer de Chine, on aurait tendance à oublier les responsabilités régionales évidentes des « sous-Impérialismes » locaux.

Rappelons aussi que les deux protagonistes actuels au Soudan ont fait ensemble un coup d’état en 2021, et éradiqué de concert les syndicats et organisations populaires qui avaient chassé le dictateur, avec l’approbation tacite et gourmande des USA. On ne peut par ailleurs oublier que les sponsors « Arabes » des deux protagonistes actuels au Soudan, quelles que soient leurs ambitions concurrentes, font indéniablement partie de la mouvance de l’Impérialisme des USA….

Non, les peuples africains qui sont martyrisés par des guerres « civiles », du Soudan au Congo, ne sont pas les responsables premiers de leurs malheurs.

L’impérialisme existe et ses méfaits ne se limitent pas à l’Ukraine et à la Palestine.


[1De Nicolas Sarkosy

   

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