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L’état d’Israël, l’antisémitisme et l’Afrique

jeudi 2 décembre 2021 par Francis Arzalier (ANC)

Dans le contexte délétère d’une campagne électorale qui n’en finit plus avant même d’avoir débuté officiellement, un sujet de politique internationale et nationale s’est transformé en France en un tabou irrationnel. Il suffit d’émettre la moindre critique à l’égard de l’État d’Israël pour être flétri comme antisémite.
L’antisémitisme, pratiquement né en France médiévale, y fut virulent jusqu’au milieu du XXème siècle. Il est depuis le siècle dernier un dérivatif irrationnel des colères sociales, une imbécillité criminelle qui, devenu doctrine officielle dans la France du Maréchal Pétain sous la protection des occupants Nazis, a conduit par trains entiers des Citoyens français de tout âge dans les camps d’extermination allemands, pour la seule raison qu’ils étaient de religion ou de culture juive.

On disait même alors à Vichy qu’ils étaient une race néfaste, une ânerie supplémentaire. Et contrairement à ce que disent encore aujourd’hui des crétins dangereux comme Zemmour ou ses pareils, s’ils furent moins nombreux à y laisser la vie qu’en Allemagne ou en Pologne, ce ne fut pas grâce à la protection du Maréchal, mais à la Résistance antinazie, aux milliers de Citoyens français, catholiques ou Communistes, qui, au péril de leur vie, les cachèrent et les aidèrent à éviter la déportation.

Quand en 1945, l’opinion découvrit les Camps de la Mort Nazie, il devint heureusement difficile de professer comme l’avaient fait Maurras ou Céline que les Juifs étaient coupables de tous les maux de la société capitaliste, chômage, pauvreté, et inégalité.

Nos modernes communiquant, toujours désireux de détourner les colères impuissantes, surent inventer d’autres boucs émissaires, les noirs de peau qui refusaient d’être colonisés et exploités, les « Bronzés », Arabes et Musulmans, qui venaient, les salauds, s’enrichir à "nos" frais en vidant à bas prix nos poubelles, et poussaient même le vice jusqu’à encombrer " nos " hôpitaux quand ils récoltaient nos microbes.
Dans une France toujours pas guérie de « la perte des colonies », les discours contre les Musulmans, toujours potentiellement "terroristes", et des migrants qui nous menaceraient d’un " grand remplacement " ont remplacé en France l’antisémitisme de grand papa, même s’il est encore sous jacent chez quelques imbéciles.

Antisémitisme, haine des musulmans, les deux se valent, et sont la mémé maladie.

Est-ce une raison pour qualifier d’antisémite toute analyse rationnelle à l’égard de l’État d’Israël, cette entité économique et militaire coloniale au Moyen Orient, qui opprime toute une région, et menace la paix du reste des nations ?

C’est d’autant plus ahurissant que cet État n’a été imaginé que dans le contexte historique de la colonisation européenne et nord-américaine du Moyen-Orient et de l’Afrique au XXème siècle, et grâce à une escroquerie historique, le sionisme, qui inventa que tous les pratiquants de la religion juive dans le monde sont les légitimes propriétaires de la Palestine, où vivaient les Hébreux d’il y a 2000 ans, dont les pratiquants juifs du reste du monde ne sont pas les descendants.
Cette contre-vérité historique a été validée par les dirigeants mondiaux après 1945 ( USA, Royaume Uni, France, URSS, etc… ), parce qu’ils préféraient voir les Juifs survivants des massacres fomentés par les Nazis se regrouper en Palestine au détriment des populations Arabes, que faire l’effort de les accueillir chez eux.

Né de la colonisation, ce petit État peuplé par la conquête et l’expulsion des populations indigènes en 1948 est depuis près de 80 ans un État colonial et religieux, maintenu et agrandi au cœur du Moyen-Orient Arabo-Musulman (et chrétien) par des guerres successives, et grâce à une supériorité économique et militaire qui lui a été assuré par ses protecteurs occidentaux, USA, Royaume Uni, France, et autres pays de l’OTAN.

Un paradoxe total, car cet État a moins de 10 millions d’habitants ! (alors que la seule Égypte en a plus de 100, et l’Iran, son ennemi favori 90), et un territoire utile minuscule (22400 kilométrés carrés, alors que la France en a plus 400 000), dont une bonne partie est désertique. Et, contrairement à la péninsule arabe, les ressources minérales et énergétiques sont fort limitées au sein de ses frontières terrestres.

Et cependant, l’État d’Israël est devenu une des puissances régionales majeures, économiquement développée, en agriculture et industrie élaborées, et une puissance militaire importante, qui a été capable depuis sa naissance d’infliger plusieurs cuisantes défaites à ses voisins arabes, de s’étendre en Palestine occupée malgré la résistance des populations expulsées.
Son armée, forte d’un service militaire masculin et féminin, forte surtout d’une conviction majoritaire de citadelle assiégée, est aussi une des plus bardées de technologie dans le monde, sur le plan de l’information et de la surveillance, grâce à ses services secrets (Mossad) et leurs entreprises annexes (des drones de combat à l’arme nucléaire).

Ce que les spécialistes de géopolitique considèrent comme « le miracle israélien « a en fait une explication unique : l’État d’Israël, citadelle avancée de l’Impérialisme occidental au Moyen-Orient, a, depuis 70 ans, reçu des subsides Occidentaux, et surtout États-uniens proportionnellement plus qu’aucun autre État dans le monde, plus que l’Allemagne de l’Ouest redevenue puissante après 1950 grâce au Plan Marshall d’endiguement de l’URSS.

Ce pays a aussi reçu de ses protecteurs et sponsors occidentaux le droit tacite de violer impunément toutes les résolutions de l’ONU depuis 70 ans, ce qui lui permet de maintenir soixante ans après les décolonisations un authentique régime d’apartheid à l’encontre de ses sujets palestiniens, 30 ans après l’effondrement de ce système raciste en Afrique du Sud.

Ce qui n’interdit pas à l’ensemble des médias d’Occident de faire à tout instant le panégyrique de la « démocratie israélienne », parce qu’on y vote de temps à autre, oubliant que les blancs disposaient aussi du suffrage universel dans l’Afrique du Sud de l’apartheid, et du droit de décider pour les noirs, comme les citoyens juifs israéliens ont celui de décider pour les Palestiniens occupés.

Évidemment, dans l’Afrique du temps des Indépendances il y a un demi-siècle, les jeunes États refusaient de nouer la moindre relation avec ce symbole de colonisation qu’était Israël. Mais les chefs des mêmes États aujourd’hui, ceux en tout cas soumis à l’impérialisme occidental, n’ont pas les mêmes scrupules.

Le pro-occidental Ivoirien Houphouet Boigny était seul autrefois à nouer des liens avec Israël et même l’Afrique du Sud de l’apartheid, mais ce sont actuellement près de la moitié des États d’Afrique et du Maghreb qui entretiennent des relations diplomatiques et économiques, à commencer par le Royaume du Maroc et l’Égypte où l’Islam est religion d’État, ce qui n’empêche rien, et bien d’autres le font avec discrétion.

C’est surtout avec Rabat que le rapprochement se renforce, au point qu’il est question d’une éventuelle base israélienne près de Melilla, mais aussi de la fourniture de technologie militaire sophistiquée (drones, systèmes de transmission et de surveillance, etc…). C’est en effet dans ce domaine de la « guerre du futur » qu’Israel dispose d’une incontestable avance, incarnée par des sociétés multiples, comme NSO, qui produit le célèbre logiciel-espion Pegasus, Verint, Mer Group, présente au Congo, Guinée et Nigeria, et surtout en RDC où elle équipe l’Agence nationale de renseignement.

Mais aussi Elbit Systems, qui officie en Afrique du Sud, Angola, Éthiopie, Nigeria, etc. Ces sociétés spécialisées dans la cyber-surveillance travaillent, on le voit, dans des pays très divers politiquement, mais conviennent très bien aux États autoritaires qui se multiplient sur le continent, notamment ceux issus de putschs militaires.

Comme en Guinée ou au Soudan, dont les nouveaux maîtres négocient récemment avec des Israéliens… Les entreprises qu’ils représentent, très qualifiées en matière de répression politique, ne dépendent pas officiellement de l’État d’Israël, mais leurs cadres techniques et commerciaux sont pour la plupart d’anciens de l’Unité 8200 ; de l’armée israélienne, sorte de service secret spécialisé en cyber guerre.

Le mensuel Jeune Afrique, qui ne passe pourtant pas pour un brûlot révolutionnaire, a publié en novembre 2021 un dossier étoffé intitulé « Israël Connection « , ce qui ferait hurler à l’antisémitisme nos médias si un journal de l’Hexagone s’était permis les mêmes constats.

Ce qui n’empêche pas les exemples cités d’être révélateurs.

Au Cameroun de Paul Biya, les troupes d’élite (Bataillon Léger d’Infanterie) sont équipées, des uniformes aux mitrailleuses et aux blindés, par des Israéliens. Ces services, essentiels pour conserver le pouvoir d’États faibles contre les multiples oppositions, on les repère aussi au Rwanda, en Ouganda, au Niger, au Togo, et les « commerciaux- militaires » israéliens étendent leurs contacts au Tchad du dictateur Deby, au Nigéria, et même à la Lybie, par le biais du séparatiste Haffnar.

Une toile d’araignée qui ne cesse de s’étendre, au service de la répression dans les divers pays soumis à l’Impérialisme.

Que n’entendons-nous pas quand il s’agit des Chinois ou des Russes en Afrique, y compris quand leurs investissements sont profitables aux économies nationales ?

Ce qui est plus fréquent qu’on le dit, l’Éthiopie en est la preuve, et le Congo Kinshasa aussi, où, quoi qu’on en pense, les accords avec la Chine, lui permettent l’exploitation de ressources minérales en échange d’infrastructures industrielles nationales, et sans conditions politiques préalables.

Et s’il n’est pas bien sûr que les baroudeurs russes de l’entreprise Wagner, soient la solution aux désastres malien et centrafricain, qui crèvent de n’avoir pu construire un État national capable de juguler les bandes armées de délinquants et de fanatiques, leur arrivée dont on parle beaucoup ne peut être pire que les ingérences françaises et israéliennes dont on ne parle pas.

2/12/2021

   

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