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Le symptôme Zemmour

mercredi 3 novembre 2021 par Francis Arzalier, ANC

La marche de l’histoire n’est pas linéaire, et certains philosophes ont pu comparer à une balançoire, qui monte très haut dans le sens des progrès dans un sens, avant de repartir en sens inverse, et de détruire éventuellement ce que les hommes avaient conquis.

Après le temps des Lumières et des Révolutions de la fin du XVIIIème siècle, vint le temps des Restaurations qui prétendait effacer ces vents de libertés et rétablir pour un temps en Europe les Rois, les Seigneurs terriens et les Églises fanatiques.

Au cœur du siècle XX, l’écrasement des Nazismes et Fascismes par les soulèvements des peuples, et l’avancée des Armées Rouges d’Europe et d’Asie, ont permis quelques décennies d’indépendances nationales et de conquêtes sociales. Notre nation Française en avait hérité de services publics et de droits sociaux qui faisaient fort-envie aux démunis d’Afrique.

Puis, insensiblement, et vers la fin du siècle, la balançoire est repartie en sens inverse, avec l’effondrement inouï du " Camp Socialiste ", le démantèlement chez nous des industries et des foules ouvrières, le règne sans partage du " Marché " sur la vie matérielle et les esprits, conditionnés et formatés par les technologies de manipulation.

Nous sommes encore aujourd’hui dans ce retour du balancier qu’on peut qualifier de " Contre-Révolution Libérale ", à la fois économique, sociale, politique et culturelle. Elle est multidimensionnelle, explose depuis trente ans en privatisations, destruction des services publics, inégalités grandissantes, et désarroi croissant de ceux qui n’ont que leur travail pour assurer leurs fins de mois, désemparés par le délitement des organisations de luttes sociales et politiques.
Et les deux années de Covid, en ont aggravé les stigmates.

Dans ce champ de ruines des idées et des comportements, la bourgeoisie dirigeante s’ébroue, incarnée par le banquier d’affaires Macron et sa cour médiatique, entouré de comparses falots qui voudraient bien aussi émarger au pouvoir, pour y faire le même travail destructeur des anciennes conquêtes et des libertés ébréchées.

Parmi ces candidats aux prébendes d’État, certains nous font froid dans le dos, car ils évoquent un retour aux Fascismes d’antan, et à leurs cortèges de crimes.

Ne laissons d’ailleurs pas occulter les responsables depuis 40 ans de ce retour des vieilles puanteurs Françaises : ce sont indéniablement les dirigeants successifs de la France, et de Droite et de Gauche, qui les ont suscitées, par électoralisme, nourries en trahissant tous leurs engagements.

N’est-ce pas leur grand modèle Mitterrand, qui, déjà, dans la décennie 80, expliquait à ses affidés que la croissance de Le Pen était le seul moyen d’empêcher le retour de la Droite Gaulliste au pouvoir ?

Il a fait des émules jusqu’à aujourd’hui, de Chirac se fabriquant une réélection triomphale face au » danger Le Pen « à Macron le paladin du CAC40 » reprenant le même couplet en 2017. En toute hypocrisie, car ils avaient tous nourri l’abstention et l’argumentaire du FN-RN en faisant une fois élus le contraire de leurs promesses, de Jospin privatisant à tour de bras entre deux envolées sur la primauté du public, jusqu’à son compère Hollande, lâchant la bride aux banquiers de l’UE après avoir annoncé être en guerre avec la « Finance ».

Le bilan en 2017 fut à l’issue de décennies de trahisons politiciennes réelles et de campagnes médiatiques téléguidées sur le leitmotiv « tous pourris, tous incapables », les partis politiques étaient pulvérisés, l’abstention devenait majoritaire peu à peu, et Macron le banquier d’affaires planant au-dessus du vide politique se faisait élire avec son cortège de députés-godillots, avec pour seul argument « la peur de Marine Le Pen » ! !

Quatre ans plus tard, le résultat est pire, la promotion des idées et des hommes de la Droite extrême les a transformés en personnages centraux de la campagne électorale !
Car depuis il s’agite en tous sens pour se faire réélire en 2022 de la même façon.

C’est même pourquoi ses appendices stipendiés qui peuplent les médias ont démarré avec les « télés-Bolloré » : un matraquage quotidien autour du polémiste xénophobe Éric Zemmour, qui paraissait à l’Élysée et Matignon le seul en état de pomper des voix du candidat de la Droite classique, seul jugé dangereux par le monarque sortant.

Zemmour et l’appel au pogrom

Les grandes manœuvres de cet acabit s’éloignent parfois de la cible initiale, et c’est Marine Le Pen, usée par les élections précédentes, qui subit la ponction maximale. Le résultat est en tout cas dramatique : à force d’être encouragées, les idées de l’extrême droite additionnées cumulent plus du tiers des suffrages annoncés par les sondages ! !

Ce « phénomène Zemmour », fabriqué par le Buzz « médiatique « , grâce à un personnage qui sait faire de l’audience par ses propos agressifs, scandaleux, outranciers, insultants, comme autrefois les torchons nazis, ou les tabloïds se vautrant dans le sperme et le sang pour attirer les lecteurs pervers. Ce candidat qui ne l’est pas encore réunit des supporters en foules enthousiastes sur des affirmations parfois ahurissantes !

Passe encore de reprendre la fable xénophobe du « grand remplacement » des Français tout blancs, tout chrétiens par les envahisseurs musulmans et leurs descendants bronzés, et les affirmations juste assez délirantes pour une conversation d’ivrognes franchouillards, selon lesquels « 90 pour cent des délinquants sont de l’immigration ». Reprenant le discours de guerre civile des tueurs de l’OAS en 1960, il prône d’expulser de France "les Musulmans qui ne comprennent que la force".

Ces stupidités racistes défendant une identité renfrognée d’une France imaginaire traînent depuis des siècles dans les latrines de l’extrême droite coloniale. C’est ainsi qu’il redonne une nouvelle jeunesse aux poncifs ravivés des guerres coloniales d’autrefois, en annonçant que « l’Islam (et les Musulmans) « ne comprennent que la force ».

Bernard Henri Lévy lui-même s’en étonne, qui fut pourtant le Déroulède de Sarkozy écrasant la Lybie sous les bombes. Il est en effet pour le moins surprenant de voir Zemmour, Juif Sépharade, exemple parfait des origines bien mêlées de la Nation française, dont les ascendants se virent enlever leur nationalité par Pétain, faire de lui et ses amis vichystes les protecteurs des enfants de parents déportés, et raconter que « Dreyfus était peut-être bien coupable ».

À ce niveau, la voltige intellectuelle devient un art mensonger.

Mais c’est aussi une saleté méprisable quand il reproche aux résistants communistes de 1941 d’avoir exécuté des Français pro-Nazis. Tout en se réclamant de De Gaulle ! !

Un phénomène européen ?

Certains diront que ce renouveau de peste brune en France n’est que le reflet de ce qui se passe un peu partout en Europe, ce qui n’en diminue en rien les risques, notamment d’émeutes xénophobes incontrôlables. L’objectif des bourgeoisies possédantes et dirigeantes est d’ailleurs toujours le même quand elles font la promotion des xénophobies, du racisme : diviser les travailleurs, détourner leur colère vers des boucs émissaires, juifs autrefois, musulmans aujourd’hui, immigrés ou fils d’immigrés hier et aujourd’hui.

Nos journalistes, toujours empressés à voir la paille dans l’œil du voisin plutôt que la poutre encombrant le leur, dénoncent à qui mieux mieux les turpitudes des extrémistes de droite à l’Est de l’Europe, le hongrois Orban ou les dirigeants polonais, héritiers des antisémites locaux de 1940, qui ont trouvé pour remplacer les juifs d’autrefois disparus dans les camps nazis un bouc émissaire facile, moderne, le migrant, menaçant, criminel, criant quand il le faut « Allah Aqbar ! ».
Un fantasme peu rationnel, d’autant que ces pays sont des foyers de migrations, dont les frontières sont depuis longtemps imperméables. Et certes ces politiciens démagogues en profitent pour grignoter des libertés conquises en l’autrefois socialiste par les citoyens, femmes et hommes.

Mais la version qui nous en est donnée est bien souvent falsifiée par nos communicants, notamment quand ils les qualifient de « populistes », un concept creux qui permet de couvrir de la même opprobre, communistes et extrême droite, au profit des gentils « droits de l’hommistes » de l’Union Européenne.

En réalité, pour peu qu’on y regarde, le phénomène de droitisation, fascisante OU « libérale », et d’affaiblissement des forces anticapitalistes, touche à peu près tous les pays du continent, mais de façon différenciée, dans des contextes politiques et sociaux spécifiques à chaque nation. Même si la xénophobie prétextant les « dangers migratoires » y érode partout les capacités de luttes révolutionnaires, sans prendre toujours le visage de l’extrême droite.

On ne peut qu’analyser quelques exemples.

En Espagne, le Gouvernement de coalition de gauche (PSOE, soutenu par Podemos ) ,qui a multiplié les reculades devant les pressions du patronat, vient de subir une cinglante défaite aux élections de la région de Madrid : le Parti Populaire, héritier direct du franquisme, est passé de 22 pour cent des suffrages en 2019 à 44 pour cent. Il pourra sans problème diriger la région-capitale avec son allié d’extrême droite Vox, en croissance lui aussi.
Pire encore : dans un contexte national de discrédit d’un PSOE discrédité par ses dérives droitières, les sondages annoncent une future majorité PP-VOX à l’échelle nationale !

Au Portugal voisin, le gouvernement de Gauche (socialiste), empêtré dans des mesures de plus en plus contraires aux intérêts des salariés, a perdu le soutien des Communistes, et n’a plus longtemps à vivre.

En Italie, qui eut au XXème siècle un Parti Communiste très puissant, il n’a pour héritiers que quelques groupes marxistes très réduits, et les luttes syndicales sont affaiblies, et l’extrême droite, très active, a récemment attaqué impunément le siège de la CGIL et ses militants.

En Grèce aussi, la Droite gouvernementale laisse complaisamment l’extrême droite xénophobe croître face à une Gauche discréditée par les reculades de l’épisode Tsipras, malgré les luttes courageuses menées par les Communistes du KKE.

Le contexte est différent en Allemagne, dont l’économie bénéficie de son rôle dirigeant au sein de l’Union Européenne, et de l’immigration à bas coût des pays de l’Est. Elle est aussi politiquement spécifique, par sa structure fédérale, et ses élections parlementaires à la proportionnelle. Le mécontentement social s’est exprimé lors des récentes élections par la défaite de la Droite (chrétiens démocrates) au profit d’une nouvelle coalition gouvernementale Sociaux-Démocrates et Verts, tout aussi attachés au Capitalisme, à l’UE et l’OTAN que la chancelière Merkel.

C’est même ce désir de basculer le gouvernement à gauche, qui s’est traduit par une défaite cinglante du Parti Die Linke, les héritiers affadis des Communistes de RDA. Ce parti sera encore représenté au Bundestag grâce à ses bons résultats à Berlin et Leipzig, mais il chute à moins de 5 pour cent des suffrages nationalement, soit près de la moitié moins qu’au scrutin précédent !

Avec des formes différentes, car le contexte y est divers, tous ces pays européens subissent une aggravation de la Contre-Révolution culturelle libérale, qui déferle sur leurs sociétés, et les mentalités depuis une génération.

Jusqu’à quand et jusqu’à quel niveau de régression sociale et politique ce balancier va-t’il poursuivre sa course folle ?

Nul ne peut le savoir, mais nous devons tout faire pour freiner, puis stopper cette marche à l’abîme, grosse de haines et de guerres, et de malheurs croissants pour tous les peuples, quelle que soit leur nation, leur religion ou leur couleur de peau.

2/11/202

   

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