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Et si nous parlions démocratie et droit international ?

vendredi 9 février 2024 par Francis Arzalier (ANC)

Le discours autour de ces deux concepts est omniprésent dans notre pays, notamment par l’entremise de médias formatés, que les pouvoirs d’État n’ont plus besoin de censurer comme autrefois, tant ceux qui y ont accès sont porteurs de la même vulgate libérale. Et ce discours relève constamment du « deux poids, deux mesures ».

Une véritable schizophrénie caractérise l’ensemble des « éléments de langage » officiels en « Occident », USA, Europe des 27, et leurs divers supplétifs de pouvoirs libéraux qui leur font cortège. Ce double langage est surtout évident en matière de relations internationales, et conditionne le chaos guerrier qui menace le monde actuel d’une autre Guerre mondiale, potentiellement exterminatrice.

L’Occident défenseur du droit international en Ukraine ?

Depuis des années maintenant, une propagande décomplexée se déploie en faveur de l’aide militaire aux responsables Ukrainiens contre l’ennemi russe. Dans ce flot plus ou moins abondant de justifications factuelles, la seule version autorisée est celle des annonces des services communicants de Kiev et de la CIA.

Tenons-nous en aux principes qui organisent le récit en Bons et en Méchants.

La Russie est le méchant au nom d’un Impératif intangible de Droit International. Et il est vrai qu’une de ses bases, depuis des décennies, affirmée par l’ONU, est l’intangibilité des frontières des États. C’est en fonction de ce principe que 141 pays à l’ONU ont d’emblée condamné l’invasion armée de provinces ukrainiennes en 2021 par l’armée russe, même si depuis la majorité d’entre eux, refusent d’approuver les thèses occidentales et le financement guerrier des Nationalistes anti-russes. On peut comprendre cet attachement à l’inviolabilité des frontières, garant pour les États faibles d’une indépendance souvent menacée. D’autant qu’à l’occasion de conflits entre États, une négociation difficile est toujours préférable à une guerre.

Encore faudrait-il pour conforter ce dogme pacifique, que les Puissances d’Occident qui s’en font les vertueux défenseurs l’appliquent en toute occasion. Or c’est très loin d’être le cas.

Depuis un demi-siècle, les exemples se sont multipliés d’interventions militaires occidentales contre des États désireux de choisir leur voie politique ou économique. Ce furent dès 1990 les guerres féroces de Yougoslavie, suivant l’effondrement du Socialisme fédéral, par l’entremise de Nationalismes haineux, largement financés par l’Occident US et Otanien. Cela n’excuse en rien les Nationalistes instrumentalisés et massacreurs, mais on ne saurait oublier que les bombardements meurtriers de la Serbie par les Croisés de l’OTAN se sont accompagnés en 1998 de l’invasion du Kosovo, qui était partie intégrante de l’État serbe indépendant.

Deux poids, deux mesures

L’intangibilité des frontières n’a pas non plus été, le moins du monde, respectée par les USA envahisseurs de l’Irak en 2003, où la France de Sarkozy envahissant la Libye en 2011. Dans les deux cas, l’argumentaire des Croisades occidentales arguait des turpitudes supposées des dictateurs Saddam Hussein et Kadhafi, et se réclamait de la mission occidentale « contrainte » d’apporter à ces pays les « bienfaits de la Démocratie » et de les y assujettir militairement.
Une version « moralisatrice » du Droit international, qu’on a retrouvée lors de la guerre d’occupation de l’Afghanistan, qui s’est achevée par le retrait piteux de 2021, et celui aussi peu glorieux de l’interventionnisme occidental en Syrie (2011 à 2023).
Dans tous ces cas de figure, les prétextes mis en avant par l’Impérialisme occidental, puisqu’il faut bien nommer les choses par leur nom, ne s’embarrassait guère du Droit international et du respect des frontières qu’on prétend défendre aujourd’hui en Ukraine…

Il est même un cas de distorsion plus grave des diplomaties occidentales, et cela depuis 70 ans, c’est le soutien politique et militaire absolu de l’État colonial d’Israël, grâce auquel celui-ci s’est imposé par la force au peuple autochtone de la région, celui de Palestine, expulsé, nié, occupé, mais aussi de Liban, Syrie et Égypte, amputés de parties de leur territoire (le Golan syrien par exemple).
Et cela au mépris des décisions successives de l’ONU, et de tous les principes de base du Droit international.

Et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ?

Car l’intangibilité des frontières n’est pas le seul principe sur lequel repose le droit international. Après la Défaite du Nazisme et ses comparses, et notamment dans le contexte de l’effondrement des Empires coloniaux des décennies 1960/70, la jeune ONU, reflet de tous les États du monde et notamment du « Tiers-Monde », a proclamé le « Droit des Peuples à disposer d’eux-mêmes ». Base de la décolonisation.

On ne peut manquer de remarquer qu’il est souvent contraire à l’intangibilité des frontières. L’exemple le plus évident de ce dilemme fut pour notre pays la Guerre d’Algérie, puisque les défenseurs du statut colonial contre l’insurrection nationale algérienne, du social-démocrate Guy Mollet aux fascistes de l’OAS, défendaient bec et ongles « la France de Dunkerque à Tamanrasset » (dixit Mitterrand). L’indépendance algérienne de 1962 fut la victoire du Droit d’un peuple à choisir son destin sur le principe d’intangibilité des frontières tracées par les colonisateurs.

Ce n’est pas un débat terminé : en Ukraine, devenue indépendante par l’implosion de l’URSS, et tombée aux mains de Nationalistes anti-russes, les peuples majoritairement russes de Crimée et du Donbass se sont trouvés acculés à la discrimination linguistique, sociale et même à la répression militaire après 2014. Pour eux, comme autrefois pour les Algérien, le droit d’un peuple à décider de son avenir prime sur le respect de frontières tracées autrefois en dépit des citoyens.

Le « messianisme démocratique » occidental

En fait, les puissances ex-coloniales d’Europe occidentale et d’Amérique du Nord, lieux d’origine de l’Impérialisme, à l’encontre des autres peuples depuis 5 siècles, ont toujours diffusé des « justifications » de leurs actes de domination.
Elles furent très diverses, religieuses autrefois, « humanitaires » aujourd’hui, mais toujours aussi discutables. À tel point qu’on peut s’étonner qu’elles parviennent encore par le biais du matraquage médiatique à convaincre une grande partie de l’opinion française, qui, décidément, a bien du mal à se dépouiller de ses héritages coloniaux, et notamment de ce messianisme occidental qui fait de notre « monde libre » le gendarme du monde, persuadé d’être qualifié (par ses Dieux ou ses gènes ?) à imposer à d’autres sa version des Droits Humains, et de la Démocratie…

C’est le cas pour le thème obsédant dans le discours occidental de la Démocratie, présentée comme caractéristique spécifique de « notre camp », États Unis bien sûr, puissances européennes de l’Ouest, rassemblées dans l’UE et l’OTAN, et leur cortège d’alliés des divers continents, Japon et Australie, Canada, Israël, Maroc, Coté d’Ivoire, etc… par opposition aux « dictatures autoritaires », Russie, Chine, Vietnam. Iran, Syrie, etc…, qui les menacent.

Cette dichotomie repose sur l’affirmation de l’unicité de ce qu’on nommait aux temps de la « guerre froide » le « Monde Libre », par opposition à l’Union Soviétique et ses alliés communistes. Le mot passant de mode avec la disparition du « mal » soviétique, on le dit aujourd’hui « monde démocratique ».
Or, les seules similitudes entre les pays ainsi qualifiés, sont le Capitalisme et la liberté d’entreprendre en économie, et l’accession au pouvoir politique par le biais d’élections opposant des partis différents.

Sommes-nous en démocratie ?

Démocratie : Ce mot, en Grèce antique, découle de « démos » (le peuple et « cratein »
(gouverner). Il signifie donc « le gouvernement du peuple par lui-même, par les citoyens qui le composent », ce qui exprime plus une aspiration, un idéal politique, qu’une réalité politique et sociale.

Sur le plan économique et social, le Capitalisme, au sein duquel une minorité de possédants des grands moyens de production ont toute liberté de décider du sort de la majorité des citoyens qui ne les possèdent pas, peut difficilement être assimilé à une Démocratie.

Pour s’en tenir à la France, l’état officiel de pauvreté (moins de 1158 euros par mois) concerne aujourd’hui 9,1 millions de personnes. Face à eux, les plus riches actionnaires (dont Bernard Arnault et ses 170 milliards d’euros en patrimoine) ont connu un gonflement mirifique de leurs revenus ces dernières années.

Qui peut croire dans ce contexte à l’égalité entre citoyen français ?

Nos États se proclament Démocraties parce que des élections ont lieu périodiquement pour désigner les titulaires des pouvoirs, locaux et nationaux. Peu importe dans ce postulat que le suffrage universel soit ouvertement truqué, par des découpages électoraux soigneusement calculés, que les divers élus aient tout loisir de pratiquer une fois au pouvoir l’inverse de leurs promesses d’avant le scrutin, que les médias omniprésents totalement inféodés à la bourgeoisie possédante et à son idéologie libérale formatent l’opinion à leur gré.

Ils peuvent même se targuer d’une liberté d’expression entre tenants de clientèles politiciennes diverses, qui se disputent les avantages du pouvoir, mais sont d’accord sur l’essentiel des objectifs sociaux, comme le récent gouvernement Attal le démontre. Une caricature de Démocratie politique, où les colères impuissantes sont de plus en plus détournées contre des boucs émissaires, immigrés et leurs descendants, qui peuplent les banlieues et les imaginaires de milliers de crétins apeurés.

Cinq siècles avant le Christ à Athènes, qui inventa la « démocratie », les esclaves, les étrangers, les femmes, ne participaient pas aux choix politiques de la Cité. Ils formaient pourtant plus de la moitié des habitants, ce qui amène à relativiser cette réalité politique.

Dans un contexte différent, la « démocratie occidentale » contemporaine est plus éloignée encore du pouvoir du peuple sur lui-même.

Quelque opinion que l’on ait des méthodes ou des objectifs politiques des dirigeants de ces États maudits que sont pour nos médias la Russie ou l’Iran, le constat de tout observateur sérieux est que la popularité de Poutine ou des Ayatollahs de Téhéran est considérablement plus grande que celle de Macron et ses séides en France, et donc moins éloignée de l’idéal démocratique.

Affirmer le contraire et s’en prévaloir à chaque instant relève de cette « arrogance française » qui nous est si fort reprochée dans le monde.

09/02/2024

   

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