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Passionnante Interview de Sergueï Lavrov : Russie/OTAN/UE/ Ukraine avant les discussions Biden Poutine et Russie USA

jeudi 30 décembre 2021 par Sergueï Lavrov, Ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie

Une interview clef qui dit tout ce que l’on ressent au Kremlin et surtout ce que l’on y pense (ça leur arrive de penser aux Russes !).(BD-ANC)

- 27-12-2021
Vladimir Soloviev : Nous sommes actuellement comme des oiseaux à trois ailes. Notre Ministère des Affaires étrangères agit sur trois axes : la communication avec les partenaires américains ; avec l’Otan ; et avec les Européens, quel que soit le nom qu’ils se donnent (l’OSCE est un peu plus large que la seule dénomination "Européens"). Quel est l’élément principal de ce dialogue difficile, que nous avons entamé avec des méthodes totalement inhabituelles pour la diplomatie russe traditionnelle ? Il s’avère que c’est très efficace. Quelle est l’orientation principale ?

Sergueï Lavrov : L’essentiel, comme l’a dit le Président russe Vladimir Poutine, est qu’il n’y ait pas de bavardage, que nos propositions ne s’enlisent pas dans des discussions sans fin, ce que l’Occident sait faire et ce pour quoi il est réputé. Pour que tous ces efforts diplomatiques donnent un résultat. Et un résultat dans un laps de temps bien défini. Nous ne lançons pas d’ultimatums, mais nous n’avons pas besoin non plus de négociations sans fin, au cours desquelles l’Occident recommencera à faire des promesses ambiguës, qu’il ne tiendra pas à coup sûr. Les États-Unis sont le principal pays avec lequel nous négocions. C’est avec les États-Unis que nous tiendrons le principal cycle de négociations, qui commencera dès la fin des vacances du Nouvel An.

Jens Stoltenberg, Secrétaire général de l’Otan et président du Conseil Otan-Russie, a suggéré (manifestement à la demande des États-Unis) qu’une réunion du Conseil Otan-Russie se tienne immédiatement après, littéralement un jour plus tard. Cette forme d’organisation reflète les projets que nous avons proposés et présentés aux Américains et à l’Otan. Je veux parler de l’accord sur les garanties de sécurité entre les États-Unis et la Russie et de l’accord entre l’Otan et la Russie sur la limitation des risques et des menaces sur le théâtre européen (par un théâtre d’opérations militaires, j’espère). Ces accords contiennent des propositions très concrètes. Vous avez vu ces documents. Ils portent sur la manière dont nous envisageons une configuration moins dangereuse des forces du côté de l’Otan et du côté de la Fédération de Russie et de nos alliés.

Vladimir Soloviev : Qui va mener les négociations ?

Sergueï Lavrov : Les négociations seront menées par une délégation interministérielle avec la participation du Ministère des Affaires étrangères et des militaires. En ce qui concerne les États-Unis, il n’y a pas de malentendu. En ce qui concerne l’Otan, nous les avons prévenus que dans la mesure où ils ont gelé pratiquement toutes les activités sur la thématique militaire depuis 2014 et qu’ils se sont limités à des appels téléphoniques occasionnels au chef de l’état-major général, la conversation n’aura de sens qu’avec une participation directe des militaires. Les militaires seront représentés à haut niveau dans notre délégation. Nous leur avons demandé de confirmer si nous avions bien compris qu’ils feraient la même chose de leur côté. Nous attendons une réponse.

Vladimir Soloviev : L’Otan, justement, se comporte de manière assez étrange. D’une manière générale, nous ne communiquons pas avec eux - pas du tout, en fait. Ils ont expulsé nos représentants. Les contacts ont été presque entièrement détruits. Ce que Jens Stoltenberg s’est permis de dire a provoqué une crise internationale. Il a déclaré que, le cas échéant, ils seraient prêts à déployer l’infrastructure nucléaire de l’Otan à l’Est de l’Allemagne. Le Président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko, a répondu, après quoi on a commencé à formuler des prétentions à son égard.

Sergueï Lavrov : Oui, Jens Stoltenberg a un caractère "nordique". Il s’exprime sans trop de circonvolutions. C’est vrai, oui.

Vladimir Soloviev : Comment communiquer avec lui ?

Sergueï Lavrov : Cette communication ne se fera pas avec lui. Une fois encore, je voudrais dire que nous avons proposé un traité entre la Russie et l’Otan. Il n’est absolument pas nécessaire, bien qu’il ne soit pas interdit, que ce traité soit préparé dans le cadre du Conseil Otan-Russie. Le négociateur ne sera pas Jens Stoltenberg, qui est globalement le chef administratif du secrétariat de l’Alliance de l’Atlantique Nord. Il s’agira des membres clés du bloc, principalement des États-Unis.
Ce n’est pas pour rien que le Président des Etats-Unis Joe Biden a réagi à notre initiative dans les jours qui ont suivi sa présentation. Il a mentionné le cercle des négociateurs : "Les États-Unis + les quatre principaux États occidentaux". Les autres membres de l’Otan et même l’Ukraine ont immédiatement réagi en déclarant qu’ils avaient l’obligation de participer à ces négociations. Pour nous, ce qui compte, ce n’est pas la forme du contact avec l’Otan mais le fond des négociations. Tout d’abord, la nécessité de parler au niveau militaire de manière professionnelle et responsable.

Vladimir Soloviev : L’Otan est, de l’extérieur, une structure très amorphe. Ils disent : qu’attendez-vous de nous ? Nous avons besoin d’un consensus entre les pays.

Sergueï Lavrov : Cela ne nous intéresse pas. C’est leur problème interne. Nous ne sommes pas intéressés par ce que contient le traité de Washington, notamment l’article 5 qui impose de défendre tous les membres. Si l’Otan était une alliance défensive, comme Stoltenberg ne cesse de le répéter à "tous les coins de rue", l’organisation ne se serait pas étendue vers l’Est.
L’Otan, aujourd’hui, est un pur projet géopolitique pour s’emparer de territoires qui semblaient "abandonnés" après la disparition du Pacte de Varsovie et la chute de l’Union soviétique. Voilà quelle est la nature de leur activité. Le fait qu’ils "mettent la main", comme l’a dit le Président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine, sur le "seuil de notre maison", ne peut pas nous laisser indifférents.

Vladimir Soloviev : Qu’en est-il du droit qu’ils ont eux-mêmes proclamé pour chaque pays de choisir lui-même ses alliés ? Ils essaient en permanence de nous le "faire avaler".

Sergueï Lavrov : Ils essaient, d’une certaine manière, de se soutenir. Il s’agit d’une tentative sans scrupules d’utiliser, avec des "moyens impropres", un document qui est le fruit d’un compromis dont on ne peut retirer une seule brique car alors tout le compromis s’écroulerait. C’est exactement ce qui est fait. Même la Charte de Paris pour une nouvelle Europe de 1990 stipule que chaque État a le droit de choisir les méthodes par lesquelles il entend garantir sa sécurité, notamment par l’adhésion à des alliances. Mais elle précise également que cela doit se faire dans le respect du principe d’indivisibilité de la sécurité.

Vladimir Soloviev : C’est-à-dire que, comme l’a dit le Président russe Vladimir Poutine sur le thème du gaz, "ils mentent encore" ?

Sergueï Lavrov : C’est une demi-vérité, ce qui est certainement pire qu’un mensonge direct car ils essaient de faire en sorte que leur position soit juridiquement irréprochable. Bien que le terme "juridiquement" ne soit pas approprié ici. Tous ces documents - la Charte de Paris pour une nouvelle Europe et les documents du sommet d’Istanbul de l’OSCE de 1999 - sont des engagements politiques.
Il en va de même pour l’Acte fondateur Otan-Russie de 1997, qui est également un document politique. Tous ces engagements politiques, solennellement proclamés à haut niveau, de ne pas renforcer sa sécurité au détriment de celle des autres, de ne pas déplacer les infrastructures militaires, de ne pas déployer de forces de combat substantielles ont été détruits de manière répétée et constante, y compris, comme l’a dit le Président russe Vladimir Poutine, par la quintuple expansion de l’Otan contraire à toutes les promesses.
C’est pourquoi nous n’insisterons désormais (il ne peut y avoir d’autre solution) que sur des garanties de sécurité juridiquement contraignantes : "Fais confiance, mais vérifie".

Vous avez mentionné l’OSCE - la façon dont cette organisation veut se positionner est un sujet à part. En 1975, lors de la signature de l’Acte final d’Helsinki (il s’agissait alors encore de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe), le président américain Gerald Ford avait déclaré solennellement, je dirais même avec grandiloquence : "L’histoire jugera cette conférence non pas par ce que nous disons ici aujourd’hui, mais par ce que nous ferons demain, non pas par les promesses que nous faisons, mais par celles que nous tiendrons".

Vladimir Soloviev : Des paroles pleines de sagesse.

Sergueï Lavrov : Je dirais même "des paroles en or". Nous sommes guidés par ce testament de l’un des plus grands présidents américains.

Vladimir Soloviev : Dans le même temps, Jens Stoltenberg affirme "nous n’avons jamais promis à la Russie que l’Otan ne s’étendrait pas vers l’Est, Gorbatchev me l’a dit lui-même". Après quoi je montre la vidéo à Gorbatchev qui dit : "Comment peuvent-ils dire qu’ils n’ont rien promis ? James Baker me l’a promis le 9 février 1990. Voilà, ils l’ont dit, c’était enregistré, il y a des transcriptions". Pour ces personnes, seul ce qui est écrit sur le papier a un sens. Ils nous ont promis, au moins quelque part, que l’Otan ne s’étendrait pas vers l’Est. C’est bien le genre de narration que les Américains ne cessent de répéter.

Sergueï Lavrov : Bien sûr qu’ils l’ont promis. Récemment, j’ai lu quelque part les souvenirs d’un diplomate anglais qui avait participé aux pourparlers, y compris ceux liés à la réunification de l’Allemagne et aux thèmes qui s’étaient "enroulés" autour de l’Allemagne unie dans le contexte de l’Otan, les armes nucléaires, qui ne devaient pas se situer à l’Est de la ligne où elle suivait à l’époque. Il dit que, oui, ils ont vraiment promis que l’Otan ne s’étendrait pas, mais bien sûr, ils ne le pensaient pas. Ils étaient tirés en avant par la chance historique de "construire" une nouvelle Europe sans affrontements, etc. Zbigniew Brzeziński, dans une conversation avec l’un de ses collègues, a dit sans ambages : "We tricked them" - "Nous les avons piégés".

Vladimir Soloviev : Au temps de Boris Eltsine, nous-mêmes n’avions demandé aucun engagement écrit, au contraire, nous avions convenu lors d’une visite en Pologne que…

Sergueï Lavrov : C’est tout ce qu’il y avait dans nos relations avec l’Occident lorsque l’Union soviétique a disparu et qu’une nouvelle relation s’est construite - le Président russe Vladimir Poutine l’a dit à de nombreuses reprises. Il y avait un niveau de confiance absolument sans précédent, un niveau de volonté d’être amis, un désir de devenir presque alliés, comme le rappelle périodiquement Vladimir Poutine. Mais tout cela, nous le comprenons maintenant très bien, était une erreur. Vous ne pouvez pas prendre ces gens au mot.

Vladimir Soloviev : Un homme qui fut un jour à la tête du Ministère russe des Affaires étrangères, aujourd’hui retraité de Floride du nom d’Andreï Kozyrev, a fait remarquer avec condescendance que la Russie aurait déjà dû rejoindre l’Otan. Pourquoi la Russie ne veut-elle pas rejoindre la famille des nations civilisées ?

Sergueï Lavrov : Pour beaucoup de nos hommes politiques, avant tout d’opposition, l’Occident est un idéal totalement parfait, un leader incontestable à suivre en tout. Ils ne voient aucun vice dans l’Occident, ils ne voient aucun "dommage" dans ce que l’Occident fait dans le monde, en détruisant des pays, des États. Certains souhaitent simplement se soumettre à ce qui se passe. Pourquoi traverser l’océan pour aller en Floride ?
C’est une lecture quotidienne. L’administration présidentielle nous fournit une telle revue de presse, avec des articles provenant de tous les médias russes, y compris Meduza, Republic, et Novaya Gazeta. Et voilà, dans ces publications...

Vladimir Soloviev : Boulgakov avait pourtant dit : "Ne lisez pas..."

Sergueï Lavrov : Ils ne sont pas communistes…

Vladimir Soloviev : Ils sont les mêmes en essence, mais avec une pensée opposée.

Sergueï Lavrov : J’ai compris il y a longtemps qu’aujourd’hui, comme à l’époque soviétique, j’avais appris à lire les gros titres et à comprendre de quoi il s’agissait. On peut faire de même avec de nombreux médias de masse aujourd’hui. Il y a eu, par exemple, des déclarations panégyriques à la fois dans Republic et Novaya Gazeta. L’une de nos figures d’opposition bien connue a décrit ce que l’Occident a tenté de présenter comme une crise à la frontière avec l’Ukraine au printemps dernier, lors d’un nouvel exercice (il y avait eu un tollé mondial à l’époque). Puis les exercices ont pris fin et les troupes sont retournées à leurs lieux de stationnement permanent.
Il a été déclaré : "Voilà, vous voyez comment Vladimir Poutine a eu peur. Joe Biden l’a appelé et immédiatement les troupes ont été retirées". Ce texte a été écrit par une personne sérieuse qui a fait partie de notre système politique et qui était considérée comme intéressante (vous l’avez d’ailleurs reçu dans certains débats).

Puis il y a eu un grand article dans Novaya Gazeta avec le titre "Le sort d’un paria. Où va la politique étrangère de la Russie". Naturellement, il s’agissait de la Fédération de Russie qui "bafouillait", incapable d’accepter le fait qu’elle devait occuper sa "place" dans les relations internationales. Elle a perdu la Guerre froide et c’est tout. Elle aurait dû se comporter de manière plus modeste après cela. Rester là où elle s’était retrouvée après cette défaite. À titre de parallèle historique, d’exemple historique, il est fait référence à l’Allemagne et au Japon après la Seconde Guerre mondiale. Ils ont perdu, ils l’ont accepté et ont reçu une "belle démocratie". Cet article est écrit par un ancien vice-Ministre des Affaires étrangères de l’époque que vous mentionnez. Il avait d’ailleurs participé activement à nos négociations sur les îles Kouriles avec Tokyo.

Vladimir Soloviev : Ce n’est pas étonnant.

Sergueï Lavrov : Beaucoup ont eu de telles "errements". C’est une chose assez grave que de voir dans l’Occident une vérité de dernière instance.

Vladimir Soloviev : Beaucoup de gens ont eu ce genre d’errements. Mais au tout début du mandat présidentiel de Vladimir Poutine, il a déclaré que "nous ne verrions pas d’inconvénient" à accepter d’autres conditions pour rejoindre l’Otan, sur un pied d’égalité, dans le cadre d’un partenariat. Ces conditions nous sont-elles proposées ? Est-il possible pour la Russie de rejoindre l’Otan ?

Sergueï Lavrov : Bien sûr que non. Je ne visualise pas une telle situation, car tout le processus ne tourne pas autour de l’Otan ou de l’Union européenne. Il tourne autour du fait que l’Occident ne veut pas avoir de rivaux plus ou moins comparables en influence sur l’arène internationale. D’où l’hystérie suscitée par la montée en puissance de la Chine.
Elle s’est hissée en acceptant les règles du jeu que l’Occident avait introduites dans l’économie mondiale, la finance mondiale. Et dans le cadre de cette mondialisation, selon les règles de l’Occident, elle a surclassé l’Occident sur son propre "terrain".

Maintenant, Washington et Bruxelles, demandent de changer toutes les règles de l’OMC, de réformer l’Organisation mondiale du commerce. Ils disent carrément que l’Amérique et l’Europe doivent le faire. Le reste d’entre nous n’a pas besoin d’y penser. Nous vous dirons ce qu’il faut faire plus tard. Je ne vois même pas d’idéologie ici. Le Président russe Vladimir Poutine a dit à plusieurs reprises qu’il ne s’agit pas tant d’une idéologie que d’une lutte d’influence.

Vladimir Soloviev : Napoléon disait que la guerre était avant tout une question de géographie. La politique est avant tout une question de géographie.

Sergueï Lavrov : Oui, c’est le cas.

Vladimir Soloviev : Nous sommes donc les ennemis ? C’est-à-dire que pour l’Otan nous sommes l’ennemi à abattre ?

Sergueï Lavrov : La forme que peut prendre cette vie, cette géographie, peut aussi être appelée hostilité. Mais il peut aussi s’agir de rivalité et de concurrence. Si l’Occident s’engageait dans une concurrence loyale, je pense que ce serait la meilleure façon de sortir de la confrontation actuelle.

Vladimir Soloviev : Ce ne serait plus l’Occident.

Sergueï Lavrov : Ce ne serait plus l’Occident. Aujourd’hui ils veulent changer les règles de la mondialisation et de l’Organisation mondiale du commerce simplement parce que la Chine est leader sur la base de ces règles. Si la Chine maintient le rythme actuel, alors elle sera la première puissance en 2030 selon tous les indicateurs.

Vladimir Soloviev : Puisque nous avons évoqué l’OMC, comment avons-nous pu, comment n’avons-nous pas honte : ils nous ont imposé des sanctions et au lieu de tomber et de pleurer, nous avons riposté. Maintenant ils disent qu’ils ont compté combien d’argent nous leur devions.

Sergueï Lavrov : Ce n’est pas l’OMC qui le fait.

Vladimir Soloviev : L’OMC est sollicitée.

Sergueï Lavrov : L’Organisation mondiale du commerce doit suivre ses procédures. Elle est aujourd’hui paralysée de manière significative. L’organe de règlement des différends était incapable de fonctionner et ne travaillait plus jusqu’à récemment. Lorsque les Chinois ont inondé l’organe de plaintes parfaitement valables et équitables contre les États-Unis en matière de concurrence déloyale, les États-Unis, par le biais d’astuces procédurales, ont commencé à empêcher l’organe de pourvoir les postes vacants, et celui-ci n’avait plus de quorum.

Vladimir Soloviev : Les Européens s’y sont adressés et disent : "que faites-vous, les Russes ? Vous nous avez infligé un immense préjudice". Alors que nous les avions mis en garde. Joe Biden les brisait sur le genou en reconnaissant que l’Europe ne voulait pas imposer de sanctions, et il s’est avéré que nous disions la vérité.

Sergueï Lavrov : Cette question n’a pas besoin d’être évoquée. C’est une démarche honteuse de l’UE. J’ai honte pour les hommes politiques qui ont osé exprimer de telles plaintes contre la Fédération de Russie. C’est simplement malhonnête.

Vladimir Soloviev : Tout le monde disait : "pour qui la Russie se prend-elle ? Son économie est presque inexistante. Comment ont-ils osé écrire une lettre aux Américains et avancer des exigences ?". Tous ceux qui voient l’Occident comme un soleil sans taches affirmaient qu’ils ne nous parleraient pas, ne liraient même pas. "Qui êtes-vous ? On va vous broyer". En même temps, comme vous l’avez dit, les Américains n’ont pas refusé. Ils analysent attentivement. Les lignes du dialogue qui aura lieu juste après les vacances ont été définies. Qui représentera la Russie dans ce dialogue ? Qui représentera les États-Unis ? Il semble que les Américains ne sont pas non plus unanimes, il y a des divergences dans la position de Jake Sullivan, dans les commentaires et la position d’Antony Blinken (peut-être stylistiques, mais on a un tel sentiment).

Sergueï Lavrov : Cela sera annoncé. Je voudrais dire qu’il s’agira des ministères des Affaires étrangères et de la Défense. Nous connaissons les plans des Américains. Ils connaissent nos plans. Je pense que ce sera annoncé bientôt.

Vladimir Soloviev : Et nous nous préparons à ces négociations quotidiennement ?

Sergueï Lavrov : Depuis l’époque soviétique nous sommes toujours prêts.

Vladimir Soloviev : Même si tout le monde n’a pas été un pionnier [référence au mouvement de jeunesse communiste, ndT.].

Sergueï Lavrov : Plus sérieusement, la sécurité du pays et les problèmes soulignés par le Président russe Vladimir Poutine ne datent pas d’hier et leur analyse ne nécessite pas la création d’un institut de recherche. Un grand groupe de professionnels gère ces problèmes. C’est lui qui préparera les positions, sera responsable du déroulement et de l’évaluation de ces négociations. Comme l’a dit hier le Président russe Vladimir Poutine dans l’émission "Moscou.Kremlin.Poutine," nous exprimerons notre avis sur ces négociations et déterminerons les mesures à prendre en fonction du rapport qui sera fourni par les spécialistes.

Vladimir Soloviev : Pour revenir aux spécialistes. Les Américains étaient extrêmement indignés par le caractère public de notre démarche. Ils continuent de dire qu’ils veulent des conversations à huis clos. D’un autre côté, ils affirment avoir également des "reproches". Sachant que certaines personnes qui étaient au pouvoir il n’y a pas très longtemps, comme Michael McFaul (qui s’est trompé, d’ailleurs, il avait été nommé Ambassadeur en Fédération de Russie mais était en fait ambassadeur à la radio Echo de Moscou. D’où l’inefficacité de son activité), disent qu’il faut exiger de la Russie de rendre la Crimée et de quitter le Donbass. En quelque sorte, "faire régner" Alexeï Navalny et "diviser" le pays. Est-ce que nous attendons une liste d’exigences qui transformera les négociations en farce ou est-ce que nous comprenons que cela n’arrivera pas ?

Sergueï Lavrov : Le Président russe Vladimir Poutine a expliqué pourquoi nous avions rendu notre initiative publique. Et le Ministère des Affaires étrangères l’a également commenté. Nous connaissons la capacité de l’Occident à esquiver toutes les questions désagréables pour eux. Quand tout est honnête, la pratique diplomatique prévoit ce qui suit : on se prépare, nous transmettons nos propositions et nous recevons des propositions. Elles sont analysées, puis les négociateurs s’assoient à une table et commencent à constituer une base commune, qui se transforme ensuite en document. Mais cela fonctionne quand les deux parties ont une volonté de s’entendre.
En l’occurrence, nous avons de sérieux doutes que le plus important dans nos propositions, une exigence inconditionnelle, qui est le non-élargissement de l’Otan vers l’Est, ne sera pas esquivée en suivant la voie traditionnelle. Et ce n’est pas seulement les Occidentaux qui le disent. Notre opposition non systémique, et même certains représentants de l’opposition systémique, affirment que toutes les normes diplomatiques ont été enfreintes.
Vous avez mentionné Echo de Moscou. Un présentateur connu (qui ne vit pas en Fédération de Russie, je crois) a dit récemment que c’était une gaffe diplomatique, que des personnes décentes ne se comportaient pas ainsi, etc.

Nous attendrons de voir ce que les Américains proposeront en réponse. Bien évidemment, nous travaillerons conformément aux consignes claires du Président de la Russie.

Vladimir Soloviev : Votre réponse a été évasive.

Sergueï Lavrov : Pourquoi ?

Vladimir Soloviev : C’est devenu encore plus inquiétant. C’est inquiétant quand une institution diplomatique utilise des termes "la réponse sera militaire et militaro-technique"…

Sergueï Lavrov : Le Président de la Russie a dit "militaro-technique".

Vladimir Soloviev : Oui, mais le vice-Ministre Sergueï Riabkov a dit militaire et militaro-technique.

Sergueï Lavrov : Le Président de la Russie a dit "militaro-technique". Je répète, il a souligné dans votre émission que la décision de la réponse concrète serait prise en fonction du rapport des spécialistes militaires.

Vladimir Soloviev : Le Président Vladimir Poutine a dit un jour que parfois en écoutant Sergueï Lavrov il croyait entendre Sergueï Choïgou… Je comprends, c’est l’époque qui est comme ça. Maintenant, quand nous allons parler aux Américains, tentons-nous de prédire leurs démarches, est-ce que nous nous y préparons ? Car c’est une partie très dure et sérieuse.

Sergueï Lavrov : Il faut d’abord voir. De toute façon, au final, tout sera posé sur la table. J’ai lu dans un de nos médias (Republic ou Novaya Gazeta) que la Russie avait "inondé" d’exigences : donnez-nous ça, n’allez pas là, n’installez rien ici. Est-ce que la Russie elle-même est prête à faire des concessions ? Toutes les négociations consistent à ce que les positions des partenaires se rencontrent au milieu. Ceux qui avancent de tels arguments oublient le plus important : cela fait longtemps que nous avons donné notre moitié, et même plus. On se trouve à proximité immédiate de nous. Il faut compter à partir du point où nous nous sommes entendus en 1997. En prenant le milieu, nous devrions avancer un peu vers la gauche.

Vladimir Soloviev : Beaucoup d’hommes aiment aller "à gauche" [en russe, cette expression désigne le fait "d’aller voir ailleurs" en termes de relations, ndT.]. C’est dangereux. Nous risquerions alors de tomber dans le communisme dans ce mouvement vers la gauche.

Sergueï Lavrov : Chaque homme a le droit d’aller "à gauche".

Vladimir Soloviev : Où voulez-vous en venir ? Vous êtes sur le point de vous prendre des "sanctions de l’enfer", comme l’a dit l’un de mes collaborateurs : "Ils n’ont aucun lien avec le paradis, c’est pourquoi ils ne peuvent nous envoyer que quelque chose de l’enfer". Voilà que Kamala Harris se "réveille" en disant que nous allons subir des sanctions telles que nous n’en avons jamais vues… Quoi, nous nous transformons en la Corée du Nord ? Nous ne pourrons plus voyager à l’étranger. Vladimir Poutine ne pourra pas "faire du shopping" sur les Champs Élysées, comme le lui avait promis la Ministre allemande de la Défense. Je vois bien Vladimir Poutine sur les Champs Élysées, entouré de Cosaques. C’est comme si elle s’adressait à nous au début du XIXe siècle. La situation est de toute façon désagréable. Ils exagèrent. Quoi : bonjour le Rideau de fer, bonjour l’Union soviétique ?

Sergueï Lavrov : Parfois, cette hystérie autour de la Fédération de Russie est une véritable hystérie. Pas chez tout le monde. Je ne vois pas du tout une telle hystérie chez les dirigeants solides. J’ai eu l’occasion de mentionner plus d’une fois la rencontre entre Vladimir Poutine et Joe Biden à Genève, où ils ont eu une conversation absolument adulte sur des questions spécifiques, tout en sachant parfaitement que nous étions très éloignés sur les questions essentielles. Mais les adultes et les politiciens expérimentés qui se sont exprimés ont finalement tracé les voies de dialogue. Ce dialogue n’avait pas eu lieu depuis de nombreuses années.

L’Otan compte dans ses rangs des personnes "pas adultes". Si on la considère dans l’ensemble on voit que l’Alliance, parallèlement au rétablissement des canaux de communication entre Moscou et Washington, a "coupé à la hache" ces derniers. Jens Stoltenberg a mis huit personnes à la porte. Nous étions limités à 10 membres du personnel (y compris le personnel technique). Personne ne pouvait plus être à Bruxelles. On ne peut pas travailler comme ça.

Il y a des gens qui comprennent la nécessité du dialogue en toutes circonstances. Et d’autres qui pensent le contraire. Vous avez mentionné Michael McFaul. Il y en a beaucoup d’autres, non seulement des politiciens retraités, mais aussi des politiciens actifs dans les pays baltes et en Pologne (l’Ukraine étant hors compétition). Ils deviennent hystériques face à toute action de la Russie sans essayer de comprendre, de se mettre à notre place et de voir quels sont nos arguments.

Cette hystérie me rappelle parfois nos adversaires tels qu’ils sont dépeints par les Koukryniksy [pseudonyme d’un trio de caricaturistes soviétiques, ndT.]. De nombreuses personnes veulent comme "entrer" dans ces dessins et s’exprimer à partir de là. Je compte sur le discernement de nos partenaires occidentaux. Malgré toutes les vicissitudes des cycles électoraux qui produisent des résultats tels que ceux que nous observons actuellement en Allemagne (lorsqu’un hérisson et une biche frétillante se retrouvent dans le même attelage), les politiciens expérimentés seront demandés.

Vladimir Soloviev : Nous ne nous transformons pas en Corée du Nord ? Pour ce qui est de nous "couper" complètement de l’Occident, d’interdire aux citoyens de voyager, d’exporter des produits chez nous.

Sergueï Lavrov : Je ne peux pas me porter garant des fous qui poussent les pays occidentaux dans cette direction. Je ne les vois pas encore au pouvoir en Occident. Je ne peux pas me porter garant des fous qui tentent ainsi "d’enflammer" les pays baltes, les Ukrainiens et les Polonais. Je suis convaincu que même si ce scénario fantastique se concrétise dans une certaine mesure, nous trouverons une réponse.

Récemment s’est tenue une conversation entre le Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine et le Premier ministre du Luxembourg, Xavier Bettel. Le Ministre luxembourgeois des Affaires étrangères Jean Asselborn (nous avons été nommés à peu près au même moment) me dit lors de nos conversations et publiquement que les sanctions sont inutiles. N’a-t-on pas encore compris que la Russie prouvait chaque jour sa capacité à résoudre tous les problèmes et qu’elle ne changerait pas son mode de vie et ses croyances simplement parce que l’Occident s’est mis "en colère" et a fermé certaines technologies ? L’avion MC-21 s’est envolé de toute façon, mais on a perdu un an et demi.

Vladimir Soloviev : La vie politique intérieure du pays ne dérapera pas non plus ? Les gens s’inquiètent du fait qu’une recherche d’ennemis est en cours…

Sergueï Lavrov : Allons-nous devenir une forteresse assiégée ? Je suis sûr que cela est complètement absent des plans des dirigeants russes. Dans les discours du Président Vladimir Poutine, on entend constamment son engagement à élargir les possibilités de libre développement de la société et des principes démocratiques.

Vladimir Soloviev : Qui incarne donc la "démocratie" aujourd’hui ? Nous ou les pays qui organisent des "forums sur la démocratie", en choisissant les participants qui leur conviennent. La Russie et la Chine "ne peuvent pas", car elles sont prétendument des États autoritaires.

Sergueï Lavrov : Ce n’est déjà plus d’actualité. Qui est une "démocratie" et qui ne l’est pas. En tout cas, pour moi, ces termes ont perdu toute signification. Vous avez mentionné le "sommet pour la démocratie" convoqué par le Président des Etats-Unis Joe Biden. Si vous regardez de près la liste des participants, ils n’ont même pas été sélectionnés selon les critères de ce qu’on appelle la "démocratie américaine", selon ce qu’ils considèrent comme un exemple de démocratie. La grande majorité d’entre eux suivent la ligne américaine sans se poser de questions. Pour la forme, il y a des pays qui ont leur propre vision du monde mais qui veulent avoir de bonnes relations avec les États-Unis. Mais au final, tout le monde souhaite avoir de bonnes relations avec les autres pays du monde. Tout dépend à quel prix.

Aujourd’hui ils annoncent des plans de "sommet pour la démocratie" en 2022, de créer une organisation. C’est une proposition directe de créer une alternative à l’Onu. Pour eux, les Nations unies sont un "repaire d’arriérés", de conservateurs, de rétrogrades, tandis qu’eux seraient à l’avant-garde et feraient avancer le "phare de la démocratie". Ce sera une nouvelle tentative de déplacer le centre de la prise de décisions depuis les structures universelles, où il faut débattre, vers ses structures propres où personne ne débat vraiment. La vérité ne naîtra pas de là.

Vladimir Soloviev : Vous connaissez très bien les États-Unis. Quand nous avançons nos exigences, nous disons : cessons de nous considérer comme des ennemis, nous proposons directement aux Américains de changer la loi CAATSA ("contrer les adversaires de l’Amérique par les sanctions") adoptée par le Congrès et le Sénat. Nous comprenons que cela ne dépend même pas du Président.

Sergueï Lavrov : Nous ne disons pas cela aux Américains.

Vladimir Soloviev : Nous proposons de cesser de nous considérer comme des ennemis.

Sergueï Lavrov : Ce sont des choses différentes. Nous n’avons jamais demandé à qui que ce soit de lever les sanctions contre nous. Nous ne nous abaisserons devant personne.

Vladimir Soloviev : Ne pas se considérer comme des ennemis signifie changer leur législation. Joe Biden ne peut pas s’entendre avec le Congrès et le Sénat.

Sergueï Lavrov : Nous n’avons jamais demandé de ne pas être considérés comme des ennemis. Nous avons dit que nous partions du principe que ni la Russie ni les États-Unis n’avaient de raisons insurmontables nous poussant à être ennemis.

Vladimir Soloviev : Les diplomates sont des gens polis. Mais cela est perçu ainsi : ils nous ont désignés en tant qu’ennemis au niveau législatif.

Sergueï Lavrov : Nous ne courrons pas après eux pour demander d’annuler ces lois.

Vladimir Soloviev : Joe Biden signera, mais le Congrès et le Sénat, unis dans leur politique antirusse, demanderont pourquoi ils ont signé. Comme avec l’accord iranien.

Sergueï Lavrov : C’est impossible à garantir. Les négociations de Vienne devraient reprendre avant la fin de l’année (le Noël catholique a déjà été fêté). Depuis le début, l’Iran a indiqué parmi ses conditions pour revenir à l’accord, en plus de la nécessité d’annuler les sanctions imposées par Washington à l’Iran, que les États-Unis devaient respecter à part entière leurs engagements, ne pas entraver la réalisation des projets économiques de Téhéran et de ses partenaires étrangers qui sont parfaitement conformes à cet accord. L’Iran a également proposé d’écrire que les États-Unis ne se retireraient plus de l’accord que nous rétablirons.
Les Américains disent qu’ils ne peuvent pas.
Précisément pour la raison que vous avez évoquée. C’est effectivement le cas. Les multiples sanctions contre la Russie, y compris CAATSA et celles prévues par la loi sur le soutien de la stabilité et de la démocratie en Ukraine, tout ce qui a été approuvé par le Congrès ne peut pas être changé par le président et son administration. Vu ce qui s’y passe aujourd’hui, la bacchanale antirusse est un élément fédérateur. Je suis certain que du point de vue de la fierté et du pragmatisme nous devons l’oublier et nous concentrer sur la fabrication de nos propres ailes composites pour nos avions, et du reste aussi.
Nos produits alimentaires sont déjà locaux.

Vladimir Soloviev : Ils sont incapables de tenir leurs engagements. Un garde-frontière russe ou une base militaire russe, voilà une véritable garantie du non-élargissement de l’Otan vers l’Est. Il est impossible de s’y approcher. Comme le font les Américains : ils déplacent leur infrastructure militaire et nous mettent devant le fait accompli.

Sergueï Lavrov : C’est précisément une ligne rouge. Que celui qui a des oreilles entende. La même chose avec les yeux. Le Président russe Vladimir Poutine l’a expliqué très clairement.

Vladimir Soloviev : Ils disent que nous avons concentré des forces à la frontière avec l’Ukraine. Ils ne savent pas exactement combien, 94.000 ou 120.000. Ils ne savent pas non plus à quelle distance, 200 ou 400 km. Je demande à l’ancien ambassadeur d’Ukraine, combien de forces ukrainiennes, à quelle distance sont-elles de notre frontière ? Il dit que cela ne joue aucun rôle, parce que nous sommes une créature infernale.

Sergueï Lavrov : Alors qu’eux sont des créatures du paradis. Cela ne m’étonne pas. Il est impoli d’adopter les positions qu’adoptent aujourd’hui l’Occident et l’Otan. Les pays baltes, les Polonais et les Ukrainiens sont montés contre nous. C’est évident. Nous sommes sur notre territoire. Comment expliquer encore plus clairement que ne l’a fait le Président russe Vladimir Poutine pendant sa conférence de presse : imaginez-vous une situation où il se passerait à la frontière américaine du côté du Mexique ou du Canada la même chose qu’aux frontières occidentales de la Fédération de Russie.

L’Ukraine est activement armée, on se vante d’avoir fourni des munitions et des armements, notamment offensifs, pour 2,5 milliards de dollars depuis 2014. En octobre-novembre dernier a été rapportée la livraison de systèmes antichars Javelin et de munitions pour presque 100 millions de dollars. Je n’exclus pas la volonté d’alimenter des sentiments militaristes, de faire une petite guerre. Puis d’en accuser la Russie, décréter de nouvelles sanctions pour porter atteinte à notre compétitivité. J’ai lu hier qu’une certaine personnalité en Europe avait dit : pourquoi attendre que cela commence ? Il a proposé d’adopter des sanctions de manière préventive, et de les lever si cela n’arrivait pas. Il est évidement que personne ne les lèvera jamais.

Si nous parlons de la situation en Europe, il faut dire quelques mots sur l’UE. En 2016, la diplomatie de l’UE était dirigée par Federica Mogherini. Elle a initié, reçu l’approbation et adopté une politique de cinq principes vis-à-vis de la Russie. L’un d’eux prévoyait de travailler avec nos voisins pour les "détacher" de la Fédération de Russie. Il était nécessaire de "travailler" avec notre société civile (on comprend ce que cela signifie). Le principe directeur était : l’UE normalisera les relations quand la Russie remplira les Accords de Minsk. Tous ceux qui les ont lus comprendront que c’est de la schizophrénie politique.

Federica Mogherini est partie (à l’issue de son mandat). Josep Borrell lui a succédé à la tête de la diplomatie européenne. Je le connais depuis longtemps, depuis qu’il était Ministre des Affaires étrangères de l’Espagne. Il était venu pour dire qu’il souhaitait une nouvelle politique constructive envers la Russie. Après sa visite à Moscou il a fait l’objet de très fortes critiques parce que nous avions expliqué ce que nous pensions d’Alexeï Navalny et de tout le reste : du rôle de l’Allemagne et dans l’ensemble de l’Europe dans l’exacerbation de ce mensonge, de l’incapacité de fournir des preuves et de répondre à des questions élémentaires, notamment posées par l’opposition au parlement allemand.
Des questions très claires et des tentatives honteuses de l’ancien gouvernement allemand d’esquiver des réponses honnêtes. Quand Josep Borrell a terminé la préparation de la nouvelle initiative, le Conseil européen a décidé de maintenir les cinq principes de Federica Mogherini (la Russie "doit" remplir les Accords de Minsk) et a solennellement proclamé une nouvelle approche : "Repousser, endiguer et impliquer". Je me suis imaginé la chorégraphie de tout cela. Pardonnez-moi l’expression, mais c’est du kamasutra politique.

Vladimir Soloviev : Chaque fois, vous devez tout réexpliquer. Vous avez fait la leçon à d’innombrables secrétaires d’État américains, qui sont venus comme des "pages blanches". Maintenant, vous devez former des diplomates européens. Il s’avère notamment que personne ne sait lire. Les Accords de Minsk : l’Europe entière crie que la Russie n’est pas un garant, mais une partie au conflit. Une ukrainisation de la politique européenne et américaine est en cours.

Y a-t-il un intérêt à parler aux Ukrainiens ? Je veux dire, à leur establishment politique ? Parce que le tapage fait par Vladimir Zelenski et Pavlo Klimkine, qui se prétend Ministre des Affaires étrangères, bien que sous un autre nom de famille maintenant, est impossible à commenter. J’ai l’impression que les visages changent, mais que l’essence de la politique de Pavlo Klimkine reste la même.

Sergueï Lavrov : C’est un cas difficile, en fait. Vladimir Zelenski, qui a participé aux élections à l’image de Goloborodko, personnage qu’il incarnait dans la série "Serviteur du peuple", avec ses principes progressistes, ses appels à libérer le peuple des oligarques, à respecter les droits des Russes et des autres minorités nationales et, surtout, à apporter la paix au Donbass, n’est pas très différent d’Arseni Iatseniouk. Quand ce dernier était Premier ministre, il s’est également rendu à la frontière, a installé des barbelés et a commencé à creuser des tranchées, ce que tout le monde a oublié. Sur place, Arseni Iatseniouk a qualifié les habitants des républiques autoproclamées de "non-humains".

Vladimir Soloviev : "Subhumans". Il l’a écrit dans une déclaration.

Sergueï Lavrov : Vladimir Zelenski, dans une de ses interviews, a dit : "Eh bien, ce sont des spécimens". Un peu plus tôt, le Président de l’Ukraine avait déclaré de manière assez émotionnelle que "si quelqu’un en Ukraine se [sentait] Russe, alors qu’il dégage en Russie". Cela a été exprimé mais pas un seul représentant de l’Occident - ni dans les capitales européennes ni aux Etats-Unis - n’a commenté cette déclaration scandaleuse.

Vladimir Soloviev : Il a qualifié de "spécimens" les personnes qui subissent les sanctions du Conseil de sécurité et de défense de l’Ukraine.

Sergueï Lavrov : Dans le Donbass quasiment tout le monde est sous le coup des sanctions.

Vladimir Soloviev : On lui a demandé de préciser : "Vous pensez donc que ce ne sont pas des personnes ?". Il a répondu : "Quoi, vous pensez que ce sont des personnes ? Ce sont des spécimens".

Sergueï Lavrov : Il est, en principe, un "grand démocrate". Les observateurs de la vie ukrainienne notent qu’il mène également une guerre contre les oligarques, ayant fait passer une loi sans précédent qui permet de prendre des décisions politiques pour s’occuper des opposants "à sa droite". Et, dans le même temps, des adversaires "à sa gauche" : Viktor Medvedtchouk.

Nous avons demandé à plusieurs reprises à nos collègues occidentaux de commenter tout cela. Les commentaires sont amusants. Un sommet Ukraine-UE s’est tenu à Bruxelles en octobre de cette année, au cours duquel une déclaration a été adoptée : "La Russie est l’agresseur" et "la Russie est une partie au conflit". L’Ukraine a été "félicitée" pour la manière dont elle "mettait en œuvre" les Accords de Minsk. En plus de cela, ils ont exigé que la Russie assure le fonctionnement des entreprises économiques dans le Donbass, assure l’approvisionnement en électricité et en eau de ces territoires non contrôlés par Kiev, afin que, je cite, "les habitants de ces territoires jouissent des mêmes droits que les résidents du reste de l’Ukraine". Ensuite, si la Russie fait tout, l’UE sera en première ligne pour restaurer les économies de ces territoires une fois qu’ils seront réunifiés avec leur "patrie". C’est écrit noir sur blanc sur le papier.

Encore une chose intéressante. Quand Angela Merkel, Emmanuel Macron et Vladimir Zelenski se sont rencontrés, à la suite de leur échange ce n’est pas le porte-parole ukrainien qui a pris la parole, mais le représentant officiel du cabinet des ministres allemand, Steffen Seibert, qui a déclaré que les parties étaient unies autour de la nécessité de remplir les Accords de Minsk, et que cette unité continuera de caractériser leur position au sein du Format Normandie et sur la crise ukrainienne. En d’autres termes, l’Allemagne a souscrit à l’interprétation, je dirais plutôt à la perversion des Accords de Minsk du côté de Kiev. C’est aussi très parlant.

Nous avons ensuite demandé aux Français ce qu’il en était de la nécessité de dialoguer avec Donetsk et Lougansk, comme le préconisent les Accords de Minsk. Ils ont répondu qu’ils ne voyaient rien dans les Accords qui suggérerait la nécessité de consultations avec "ces séparatistes". Ils l’ont dit exactement comme ça. Quand nous avons attiré l’attention sur le fait que trois chaînes de télévision avaient été fermées d’un revers de la main, d’un trait de plume de Vladimir Zelenski, en violation de toutes les obligations de l’Ukraine dans le cadre de l’OSCE, du Conseil de l’Europe et de l’Unesco, les Français ont déclaré que cette décision était fondée sur la législation ukrainienne.

Vladimir Soloviev : Dans ce cas, de quoi pouvons-nous parler avec eux ?

Sergueï Lavrov : C’est comme ça que ça fonctionne en ce moment. Ils insistent pour se réunir dans le cadre du Format Normandie, et commencent à faire la publicité d’une sorte de plan en "dix étapes" introduit au début du mois de décembre au sein du Format Normandie. Ils ont transmis le projet aux Américains, au Groupe de contact. C’est tout simplement une insulte au bon sens. Ils demandent l’instauration urgente d’un régime de cessez-le-feu.

Vladimir Soloviev : A qui ?

Sergueï Lavrov : A la Russie, au Donbass.

Vladimir Soloviev : Qu’ils se le demandent à eux-mêmes.

Sergueï Lavrov : En juillet 2020 a été conclu un accord (le Président russe Vladimir Poutine l’avait commenté) consistant à ne pas réagir immédiatement à chaque tir, se calmer un peu, "allumer son cerveau" et faire un rapport à ses supérieurs. Le lendemain de cet accord, les républiques ont donné les ordres correspondants. Kiev n’a pas émis d’ordre, il a seulement fait une déclaration déformant le sens de ce qui avait été atteint (je n’entrerai pas dans les détails maintenant). On l’a appelé à plusieurs reprises à légiférer sur ce qui avait été convenu. Finalement, cela a été fait. Mais ensuite, Valeri Zaloujniy, commandant des Forces armées de l’Ukraine, a déclaré publiquement que chaque chef d’unité sur le terrain (et il y a là-bas de nombreux bandits, des "bataillons volontaires" - on imagine de quel genre de personnes il s’agit) décidait sur qui tirer et quand.

Vladimir Soloviev : Sans compter les sociétés militaires privées…

Sergueï Lavrov : Enfin, il y a quelques jours, non sans difficultés, ils ont joué un numéro d’équilibrisme verbal dont il ressort qu’ils sont quand même prêts à remplir cet accord. Je suis les rapports réguliers de nos journalistes concernant la partie de la ligne de démarcation située dans le Donbass : ils font état d’un nombre considérable de cibles civiles touchées, de civils tués, évoquent la vie sous la menace constante des bombardements. Je demande à mes interlocuteurs qui commencent à parler de "séparatistes", disent qu’il faut les "mettre au pas", qu’il ne faut pas provoquer l’Ukraine en bombardant son territoire, où est le même travail des journalistes du côté gauche de la ligne de contact.
Pour que nous puissions tous voir comment l’armée ukrainienne souffre - les Forces armées de l’Ukraine, les participants de cette "opération spéciale". Nous ne constatons rien de tel. On ne montre la partie occidentale de la ligne de démarcation que quand Vladimir Zelenski, en casque et gilet pare-balles, joue un nouveau rôle. C’est tout. C’est honteux.

Pendant la phase aiguë de la crise des migrants (c’est au sujet de la liberté d’expression et l’accès à l’information), les Polonais n’ont pas autorisé les journalistes à pénétrer de leur côté de la frontière, même si ces derniers étaient très en demande. De la même manière, ils ne veulent pas autoriser les journalistes à entrer du côté occidental de la ligne de démarcation car s’ils le faisaient, le mythe selon lequel les opposants y auraient tout bombardé, auraient tué des civils, s’effondrerait.

Vladimir Soloviev : Comment peut-on parler des Accords de Minsk et demander leur mise en œuvre si la Russie en a une lecture différente des autres participants ?

Sergueï Lavrov : Nous lisons ce qui est écrit.

Vladimir Soloviev : Oui, mais nous sommes les seuls à lire le texte comme il a été écrit. Les Américains ont adopté la position ukrainienne, tout comme les Français et les Allemands.

Sergueï Lavrov : Les Américains se distinguent tout de même par leurs approches. A Genève, pendant sa rencontre avec le Président russe Vladimir Poutine, le Président américain Joe Biden a déclaré que les Etats-Unis souhaitaient aider à remplir les Accords de Minsk, qu’ils ne voulaient pas s’ingérer dans les formats existants (c’était aussi le cas sous Donald Trump, il y avait aussi un dialogue parallèle entre Vladislav Sourkov et Kurt Walker) mais qu’ils étaient prêts à aider. Joe Biden a dit qu’il comprenait que la mise en œuvre des Accords de Minsk impliquait d’accorder une certaine forme d’autonomie.

Vladimir Soloviev : Mais Vladimir Zelenski ne l’a pas compris. C’est la raison pour laquelle on constate une pression de la presse américaine sur Zelenski ? Ils ont commencé à le critiquer fermement. Ce n’était pas le cas auparavant.

Sergueï Lavrov : Vladimir Zelenski commet souvent des imprudences. On craint cette "imprudence", le fait qu’une certaine bêtise (qui fait de plus en plus couler d’encre en Occident) puisse déclencher un conflit dont personne n’a besoin.

Vladimir Soloviev : Les Anglais se sont prononcés honnêtement : si quelque chose commence en Ukraine, ils s’en iront immédiatement.

Sergueï Lavrov : Une évacuation. A quoi encore pourraient servir des forces armées ?

Vladimir Soloviev : Ils vont partir rapidement.

Sergueï Lavrov : Concernant les Accords de Minsk. C’est un sommet de cynisme quand notre position est présentée comme une tentative de la Russie d’interpréter à sa manière les Accords de Minsk et d’exiger de Kiev qu’il les applique selon l’interprétation russe.

Vladimir Soloviev : Mais qui nous entend ?

Sergueï Lavrov : Tout le monde nous entend. Ils font juste semblant.

Vladimir Soloviev : S’ils font semblant, quelle démarche devons-nous entreprendre ensuite ? De facto, nous ne voulons pas les rencontrer, nous disons qu’ils doivent tenir leurs engagements.

Sergueï Lavrov : Dieu est du côté de la vérité.

Vladimir Soloviev : Oui, j’entends souvent cette phrase, de plus en plus souvent dans la bouche des militaires - "Dieu est du côté de la vérité, pas de la force".

Sergueï Lavrov : Car Alexandre Nevski n’était pas seulement un diplomate, mais aussi un chef de guerre.

Vladimir Soloviev : C’est-à-dire que nous allons régulièrement répéter cette vérité ?

Sergueï Lavrov : Il nous faut insister fermement sur le caractère inviolable des Accords de Minsk.

Vladimir Soloviev : Pouvons-nous imposer des sanctions aux autres participants ? Nous n’imposons même pas un paquet de sanctions normal contre l’Ukraine. Même quand nous le déclarons, nous ne nous y tenons pas.

Sergueï Lavrov : C’est un thème à part. La Russie n’est pas favorable aux sanctions. Après tout, ce qui se passe actuellement est une substitution complète de la diplomatie, de la culture du dialogue, du compromis. Dès que quelque chose n’est pas occidental : des sanctions. Et l’Union européenne "singe" déjà les méthodes américaines.

Vladimir Soloviev : Nous aussi, nous avons commencé à chercher de nouvelles mesures. Cette année, notre diplomatie se comporte de manière agressive, offensive, comme nous le souhaitions depuis longtemps. Vous vous êtes éloigné de votre style poli et ironique auquel vous étiez habitué et vous avez commencé à énoncer notre position de manière dure, très dure. Vous avez publié des correspondances avec vos partenaires occidentaux, en disant "les gars, arrêtez de mentir, c’est écrit comme ça".

Sergueï Lavrov : Ce n’est pas une manière agressive.

Vladimir Soloviev : Je veux dire, par rapport aux notions diplomatiques traditionnelles. Vous n’hésitez plus à appeler un chat un chat.

Sergueï Lavrov : Nous n’étions pas particulièrement timides auparavant non plus. Nous disions très fermement les choses dont nous étions convaincus qu’elles devaient être fondamentales sur la table des négociations entre la Russie et l’Occident.

Vladimir Soloviev : Les Accords de Minsk peuvent-ils s’effondrer ? Notre patience a-t-elle des limites ?

Sergueï Lavrov : La Russie n’est pas intéressée par l’effondrement des accords. Nous n’allons pas les saper, mais si quelqu’un d’autre le fait il ne pourra s’en prendre qu’à lui-même.

Vladimir Soloviev : La Russie va donc participer à un quelconque Format Normandie ?

Sergueï Lavrov : A condition que l’on arrête de nous prendre pour des idiots comme le font actuellement nos partenaires occidentaux en faisant semblant, de manière ostentatoire de travailler avec Kiev pour s’assurer qu’il met en œuvre les accords d’il y a deux ans. Tout le monde est d’accord pour se réunir afin de mettre en œuvre les décisions du sommet de Paris. Nous disons qu’il faut d’abord les mettre en œuvre et ensuite se réunir, car sinon les décisions du sommet de Paris et des réunions des dirigeants en général seront complètement dévaluées.

Vladimir Soloviev : C’est-à-dire que la position de la Russie aujourd’hui est : nous ne reculerons pas d’un pas ?

Sergueï Lavrov : Nous ne reculerons pas d’un pas des Accords de Minsk. Nous avons déjà fait plusieurs pas en arrière. Premièrement, les Accords de Minsk en eux-mêmes sont déjà une concession. Nous avons eu beaucoup de mal à persuader Donetsk et Lougansk de les signer, ce qui signifiait renoncer à une éventuelle indépendance après la mise en œuvre des Accords de Minsk à la lettre.
Deuxièmement, la "formule Steinmeier" que nous avons acceptée constitue une concession très sérieuse. Il y a eu un différend et Piotr Porochenko n’a pas voulu signer le statut spécial avant que les élections n’aient lieu là-bas, déclarant cyniquement que si la mauvaise personne était élue là-bas, pourquoi lui donner un statut spécial. C’est aussi un indicateur de la façon dont un homme considère sa signature sous les Accords de Minsk. La formule impliquait que le statut serait convenu à l’avance, et qu’il prendrait effet le jour des élections de manière provisoire, puis de manière permanente à partir du jour de la publication du rapport final des observateurs indiquant que les élections avaient été justes et équitables. C’est normal.

Vladimir Soloviev : Allez-vous rencontrer la Ministre allemande des Affaires étrangères ?

Sergueï Lavrov : J’ai eu un court entretien téléphonique avec elle.

Vladimir Soloviev : Elle va venir ici ?

Sergueï Lavrov : Oui, nous l’avons invitée. Elle a répondu qu’elle viendrait.

Vladimir Soloviev : L’échange s’est passé normalement ? Elle avait commencé par des déclarations sèches.

Sergueï Lavrov : Nous sommes des personnes éduquées, malgré la manière dont vous caractérisez la diplomatie russe de ces derniers temps.

Vladimir Soloviev : Nous sommes polis, mais tenaces.

Sergueï Lavrov : Quand Vladimir Poutine m’a demandé de le représenter au G20, j’ai eu la possibilité d’échanger avec Olaf Scholz, qui accompagnait Angela Merkel. C’était un geste inhabituel : elle l’avait invité pour qu’il fasse connaissance avec les membres du G20.

Vladimir Soloviev : Mais il a une position différente.

Sergueï Lavrov : C’est la particularité du système de gouvernance allemand. J’ai lu la partie de leur programme concernant les rapports avec la Russie. Y est souligné le caractère profond et diversifié des liens avec notre pays, mais aussi la disposition à une coopération constructive. Puis sont évoqués "l’annexion", la Crimée, la société civile, les droits de l’homme, etc. Un tel programme est inévitablement éclectique. Nous verrons. Tout dépendra des démarches concrètes.

Vladimir Soloviev : On attise de plus en plus. J’ai même parfois envie de dire : "Les gars. Le Nouvel an. Fêtons le Nouvel an".

Sergueï Lavrov : Qu’est-ce qu’on attise ?

Vladimir Soloviev : Non, pas nous. Tout ce qui se passe autour.

Sergueï Lavrov : Ils ne fêtent pas le Nouvel an comme ici. Ils ont bu le champagne le 25 décembre, et pour le Nouvel an ils se promènent sur les quais, etc. Chez nous, cela commence le 25 décembre et se termine le 13 janvier.

Vladimir Soloviev : Nous fêtons largement.

La nouvelle année sera pacifique ? Ce sera l’année de la diplomatie ou se révélera-t-elle être l’année de la guerre ?

Sergueï Lavrov : J’espère que ce sera l’année de la diplomatie (si c’était nous qui choisissions) mais d’une diplomatie orientée vers le résultat et réunissant les pays clés dont dépend la résolution des questions les plus importantes, rassemblés précisément pour s’entendre et non pas pour "étirer le temps" sans fin.

   

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