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« Le journalisme de terrain disparait et la presse perd sa raison d’être ». Entretien avec Jacques-Marie Bourget

jeudi 3 décembre 2020 par Edouard Vuiart

Écrivain et journaliste, Jacques-Marie Bourget a débuté sa carrière à la Nouvelle Revue Française de Gallimard, sous la direction de Jean Paulhan. Grand reporter à l’ORTF dont il est licencié en Mai 68, il travaille ensuite pour L’Aurore, Le Canard enchaîné, L’Express, VSD, Paris Match ou encore The Sunday Times et Bakchich.

Jacques-Marie Bourget a couvert, entre autres événements, la guerre de Six Jours, la guerre du Viêt Nam, les guerres du Liban, la guerre au Salvador, la première et la seconde Intifada, la première guerre du Golfe, la guerre d’ex-Yougoslavie et aussi de nombreux conflits en Afrique.

En 1985, il obtient le prix Scoop pour avoir révélé l’affaire Greenpeace (Rainbow Warrior). Dans cet entretien Les-Crises,il revient notamment sur les raisons du sabotage du Rainbow Warrior, sur les pressions politiques qu’il a subies au cours de sa carrière, et sur l’état du journalisme en Occident.

Edouard Vuiart (Les-Crises) : Dans votre article récemment publié sur Les-Crises, vous affirmez que « ce n’est pas pour protéger les essais nucléaires de Mururoa que le Rainbow Warrior a été neutralisé ». Pouvez-vous revenir sur les véritables raisons de cette opération des services français ?

Jacques-Marie Bourget  : C’est il y a quelques mois seulement que j’ai, un peu par hasard, appris la véritable raison du sabotage du Rainbow Warrior. Cet épisode tragique également scandale d’état a deux origines.

La première est que François Mitterrand a cédé à la pression d’un état-major militaire s’estimant fatigué d’avoir à déjouer et repousser les offensives des militants de Greenpeace lors de chacun des essais nucléaires dans le Pacifique. L’énervement de l’armée était fortement entretenu et relayé par Charles Hernu le ministre de la Défense. Mitterrand a cédé, il fallait donc « neutraliser » les perturbateurs écologistes sans faire de victimes.

La seconde raison, la plus importante, est qu’à la fin de la campagne d’essais nucléaires, le « pas de tir » et la protection dont il jouissait étaient utilisés pour tester d’autres types d’armes, en particulier des missiles. La DGSE ayant elle-même infiltré Greenpeace grâce à son agent, Christine Cabon, savait que des services étrangers, en particulier britanniques, avaient fait la même chose.

Le Rainbow Warrior étant alors « bourré » d’électronique (dixit la DGSE), il était évident que tout cet appareillage devait, selon les militaires, mesurer les paramètres des armes nouvelles. Mitterrand a refusé le sabotage du bateau dans le port de Rotterdam, puis au large, pour donner le feu vert sur la Nouvelle-Zélande.

E.V. : Comment expliquez-vous que le rôle joué par vos confrères Roger Faligot, Pascal Krop et vous-même dans la révélation de l’Affaire Greenpeace soit aujourd’hui totalement absent de presque tous les récits ?

J-M Bourget : Il m’est difficile d’évoquer cet aspect sans que l’on me reproche de soigner mon ego. En fait non. Et notre « disparition » de l’histoire est facile à constater si on compare la notice Wikipédia aujourd’hui consacrée à l’affaire, avec le contenu du mémoire de master rédigé par Thibault Seurin sur le même sujet, alors qu’il étudiait à Bordeaux. On trouve ici les dates de nos différentes parutions, les interventions médiatiques de Faligot, Krop et les miennes.

Si nous avons disparu, c’est que Edwy Plenel, qui accusait alors le RPR de Nouvelle-Calédonie d’avoir fait couler le bateau, a ensuite largement communiqué sur l’existence d’une « troisième équipe ».

En réalité il y avait au moins six équipes engagées dans l’opération de sabotage. Plenel a privilégié « la troisième », celle des poseurs de mines. Cette information n’ajoutait pas grand-chose à ce que j’avais révélé, et qui m’a valu le Prix Scoop.

L’avantage de la « troisième équipe » était d’entraîner la démission de Charles Hernu, ennemi de Plenel et de son protecteur Pierre Joxe. L’autre bénéfice de cette information était d’écarter les « époux Turenge » d’une incrimination pour crime, puisqu’ils n’ont pas posé la mine…

Plenel s’est accroché à ce tremplin, avec ses réseaux et le poids du Monde, journal où il travaillait à l’époque, il a lancé sa carrière de prince des révélations. Il a imposé sa construction de l’histoire, qui collait mal avec révélations. Comme on le constate dans l’histoire, il est courant, sur les vieilles photos d’effacer ceux qui ne conviennent pas.

Lire la suite de cet entretien ICI.

Photo : Vol clandestin entre Le Caire et Sanaa où J-M Bourget s’entretient avec Yasser Arafat – 1988


Voir en ligne : https://www.les-crises.fr/le-journa...

   

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