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Que reste-t-il de la gauche en Algérie ?

jeudi 7 mars 2019 par Omar Benderra

Face au libéralisme mafieux imposé par la dictature, la population oppose une tradition d’égalitarisme et de justice très ancrée, fort éloignée des dogmes et des idéologies. En attendant l’inévitable recomposition du champ politique, il ne reste donc « de gauche » que ce que le peuple, dans ses profondeurs, a conservé en termes de refus de l’injustice et de l’arbitraire, de résistance au diktat impérialiste en Palestine et d’opposition à l’alignement sur l’Occident.

L’effondrement moral et politique du camp « socialiste », en réalité un bloc de régimes sclérosés avec à leur tête l’ex-URSS, explique pour une large part le recul d’un vaste courant idéologique construit sur des idéaux de justice et de revendications égalitaires. En Occident, le mouvement de repli des courants politiques qui rejettent, avec plus ou moins de sincérité, l’omnipotence du marché ne se réduit pas aux seuls anciens partis communistes mais concerne tout autant des partis sociaux-démocrates dont les pratiques de pouvoir finissent toujours pas s’aligner sur le marché et l’ordre libéral. Le même constat peut être dressé pour les pays de l’ancien « tiers monde ». Dans tous les cas, il s’agit davantage d’un écroulement interne que d’une victoire idéologique du libéral-conservatisme. C’est bien ce que l’on constate aujourd’hui en Algérie.

Du socialisme « spécifique » au libéralisme bureaucratique

La crise de l’été 1962 au lendemain immédiat de l’indépendance obtenue le 5 juillet, opposant l’armée des frontières dirigée par Boumediene au GPRA [1] et aux maquis de l’intérieur a débouché sur l’interdiction durable de politique à une société meurtrie et traumatisée par une atroce nuit coloniale. Les partis politiques ont été interdits, seul le FLN vidé de sa substance et réduit à un pur appareil bureaucratique est chargé de relayer les options du pouvoir.

Avec le parti unique, le régime militaro-policier s’arroge le monopole de l’expression politique. Ainsi dès la récupération de la souveraineté, les orientations progressistes et sociales de la guerre de libération [2] sont graduellement abandonnées par un régime policier de plus en plus corrompu.

Les dimensions sociales de la politique de développement des années 1970 procédaient officiellement d’une version « spécifique » du socialisme qui reprenait une partie des postulats socio-économiques de différents courants du socialisme « scientifique » tout en rejetant l’irréligiosité du matérialisme dialectique. La réorientation de l’économie vers un libéralisme de comptoir de type "infitahiste", impulsée dès la disparition du président Boumediene en 1978 a été accélérée par le coup d’État militaire qui a interrompu dans le sang, le 11 janvier 1992, un processus électoral libre, sans précédent dans l’histoire de l’Algérie indépendante.

Le premier tour de cette élection qui consacrait une réalité politique pluri partisane a sanctionné la prééminence du Front islamique du salut (FIS), un parti protoplasmique autorisé deux ans plus tôt, synthèse fragile de sensibilités diverses et parfois antagoniques, se réclamant de diverses déclinaisons de l’islam politique. Le FIS était dirigé par un Majliss ech-choura dont les deux figures emblématiques étaient le très populaire prédicateur Ali Benhadj et Abassi Madani, un notable issu du mouvement de libération nationale. Les deux autres partis qui réalisaient des scores significatifs, mais en net retrait par rapport à la vague islamiste, étaient l’historique Front de libération nationale (FLN), ex-parti unique, alors dirigé par le pro-réformateur Abdelha-mid Mehri et le Front des forces socialistes (FFS) présidé par Hocine Aït-Ahmed, figure éminente de la Révolution algérienne et opposant irréductible au régime très autoritaire installé par l’armée au lendemain de l’indépendance en juillet 1962.

Ces deux formations se réclamant pour le FLN du socialisme « spécifique » historique peu ou prou revisité et, pour le FFS, du socialisme démocratique, « à visage humain » cher à Aït-Ahmed.

1989-1991 : la parenthèse démocratique

Le socialisme algérien s’est largement fondé sur l’étatisation de larges secteurs de l’économie. La bureaucratisation du commerce extérieur et son appropriation de facto par les dirigeants de la police politique et de l’armée avant même la disparition de Houari Boumediene en 1978 s’est révélée comme un obstacle à tout développement en aggravant la dépendance du pays aux exportations d’hydrocarbures et aux importations de biens de consommation finale, notamment de produits alimentaires.

Cette organisation bureaucratique est largement responsable de la crise de la dette et de la dégradation des conditions économiques générales du pays. Des cadres à la présidence de la république vont tenter de répondre à cette évolution en développant un programme de réformes fondées sur une double ouverture vers l’économie de marché – en préservant le secteur public développé dans les années 1970 – et vers l’état de droit et les libertés publiques.

Cette ouverture qui mobilise un grand nombre de professionnels et d’experts de tous les secteurs était avant tout le fait d’un groupe de cadres, qui sera connu sous l’appellation générique de « réformateurs », réunis au-tour du Premier ministre Mouloud Hamrouche. Sous l’impulsion de Ghazi Hidouci [3], ministre de l’Économie, ces cadres, appuyés par quelques dirigeants du FLN avec à leur tête Abdelhamid Mehri, étaient convaincus de la nécessité de sortir du régime autoritaire du parti unique ainsi que d’un mode administratif de gestion d’une économie inefficace structurée autour de la rente pétrolière et gazière.

Appelé en septembre 1989 par le président Chadli Bendjedid à diriger l’exécutif, Mouloud Hamrouche et son gouvernement mettront en œuvre pendant une brève période de dix-huit mois (jusqu’à juin 1991), un programme de réformes politiques fondé sur l’instauration de l’État de droit, notamment sous l’angle des libertés publiques et économiques par la démonopolisation et l’institutionnalisation des règles communes de marché.

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[2Tels qu’exprimés dans les textes fondamentaux de la Révolution algérienne, l’Appel du 1er novembre 1954 et la Plateforme de la Soummam (20 août 1956).

[3Cf. Ghazi HIDOUCI, Algérie, la libération inachevée, La Découverte, Paris, 1995, 302 pages.

   

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